Le Deal du moment : -39%
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
Voir le deal
399 €

Partagez|



Retrouvailles

Alessandra de Marbrand
Alessandra de Marbrand

Fondatrice
Nombre de messages :
1156
Date d'inscription :
24/10/2012

Retrouvailles Empty
Lun 5 Sep - 23:02


retrouvailles

WILLIAM, ARIANNA



Leo (MBF Version) - Max Richter

Les heures s'écoulèrent lentement, et parvinrent en plus de ça à s'allonger progressivement, si bien que les minutes en firent de même, tirant de plus en plus sur la longueur, et les secondes suivraient bientôt ces aînés. Cela ne faisait que trois heures qu'elle était là, et pourtant il lui semblant à elle qu'il s'en était passé sept, ou même huit. Et qu'à chacune de ces secondes, de ces minutes, de ces heures, sonnait alors une nouvelle chance qu'elle avait laissé passer, et peut être la dernière qu'elle aurait pu avoir, de suspendre le temps un d'instant, et de recombler ses dix huit derniers ans. Mais avec quoi exactement, des réponses ? Avec des mots on fait et on défait ce qu'on veut non. Alors est-ce que demander des explications aurait vraiment encore un sens ? Tout s'était éloigné, des percussions incessantes qui s'élevaient dans la salle aux applaudissements qui se ponctuaient d'éclats de rire, même l'étrange bruit qui émanait après que les conversations des uns et des autres ne se mêlent entre elles s'était affaiblit. Maintenant il ne restait plus qu'elle, et son frère - s'il était vraiment son frère - reposant son verre sur le rebord d'une fenêtre où il s'était jusque là terré et quittant la pièce pour une autre d'où venait de sortir un autre homme qui lui était familier sans l'être. Elle n'aurait pas su dire qui il était, elle ne l'avait qu'à peine vu. Non seulement était-elle déçue de n'avoir su saisir sa chance de lui parler avant, mais elle l'était encore plus maintenant qu'elle était persuadé que plus aucune autre ne se présenterait. C'est fini, se dit-elle, c'est terminé.

Oui, ça avait vraiment été une idée de merde. Mais, bon dieux, qu'est-ce qui avait pu lui faire croire qu'il était bien son frère de toutes façons. Elle aurait voulu avoir tort, vraiment. Ça aurait rendu les choses plus faciles, bien plus faciles. N'était-ce donc pas mieux de laisser l'absence de réponse parler d'elle même. Non, ce n'est pas lui. Ça les aurait tous contenté. Elle allait pouvoir partir d'ici. Elle allait rentrer et dire à son frère que oui, il avait raison, que ce n'était pas l'homme qu'elle avait cru qu'il était, que leur frère était bien mort. Pas seulement mort pour lui, mais aussi pour elle. S'il est mort pour moi il est mort pour nous, lui avait-il dit. Et puis, ce ne serait pas bien difficile après tout, il l'avait été ainsi pour elle depuis ces six ans, depuis qu'il était partit. Non que qui ce soit ne lui ait fait croire ça, non, bien au contraire. Ce soir là, son père lui avait dit que William ne reviendrait pas, et puis il avait pointé un doigt vacillant vers elle et son autre frère, Henry, et avait exclamé d'une voix ivre qu'ils n'avaient pas intérêt à partir eux aussi. Non dit consensuel, les Langham l'avait alors rengainé à ce comme mort, peut être l'était-il ou peut être pas, mais mieux valait-il qu'il le soit. Ça, elle ne l'avait réellement saisi que récemment, alors qu'elle parlait de le retrouver après l'avoir aperçu. Son frère l'avait giflé, son père avait tenté de l'enfermer à plusieurs reprises dans la maison pour qu'elle ne puisse pas sortir jusqu'à qu'il ne se rende compte qu'il avait besoin qu'elle aille travailler pour qu'il puisse s'acheter ses bouteilles. Oui, autant partir. Elle termina le fond de son verre et s'avança vers l'une des tables pour le reposer quand elle le vit réapparaître. Il avait l'air pâle, et elle le vit s'avancer au milieu de la pièce pour rejoindre son épouse et tendre une main vers elle. Le temps se suspendit, la plupart des personnes présentes s'arrêtèrent dans ce qu'elles faisaient alors que Dame Serena ne bougeait pas, contemplant d'un air furieux la main qu'on lui tendait. Finalement, elle se leva et se dirigea vers les couples qui avaient cessé de danser, tandis que, les poings serrés d'humiliation, il la suivit. Et le temps reprit son cours. Ils partagèrent une danse courte et impassible, presque triste à voir, et pourtant tous applaudirent à la fin de celle-ci, alors que les deux mariés laissèrent leur place aux autres couples et se séparèrent. Elle le vit qui se dirigeait vers l'une des tables en retrait, là où les personnes qui se sentaient en bas de la hiérarchie des tablées faisaient contre mauvaise fortune bon cœur, il échangea quelques phrases avec un couple, dont il connaissait visiblement au moins l'un d'eux et dont la femme était enceinte, avant que ceux-ci ne partirent rejoindre les autres couples pour danser. Le malheureux jeune marié les suivit du regard, sûrement pensait-il qu'il n'aurait jamais ce qu'avait ces deux là.

Ce qu'il fallait faire, était-ce s'en aller comme elle avait tout juste su s'en convaincre, ou de finalement saisir sa nouvelle chance qu'elle avait cru avoir laissé passer pour toujours. L'occasion était trop belle. Il était là, juste là, seul. Elle oubliait alors les menaces de leur frère, les supplications de sa belle-sœur, la bouteille jetée contre le mur par leur père, elle avait volée si près d'elle qu'elle aurait très bien pu se la prendre en pleine figure s'il avait pu viser correctement. Elle s'avança vers lui, et vint se placer à ses côtés. Il était tant absorbé par le reste de la scène qu'il ne sembla pas la remarquer avant qu'elle ne parvienne à articuler quelques mots malgré sa bouche sèche et l'irrépressible envie de vomir qui lui tordait la gorge et l'estomac « Des félicitations s'imposent parait-il » - « Il parait » s'était-il contenté de répondre sans entrain.  « Et pourtant tu as l'air de préférer être n'importe où plutôt qu'ici, n'est-ce pas ? » Interloqué, plus par l'utilisation du pronom tu ou par l'étrange honnêteté sur sa situation, elle ne saurait dire, il se tourna vers elle. Plissant les yeux, il sembla vouloir dire quelque chose mais s'en ravisa entre temps. Il retourna son regard vers le reste des invités et hocha doucement la tête. Elle était déçue. Non qu'elle s'attendait réellement à qu'il ne l'a reconnaisse après tant d'années, après tout elle n'était qu'une enfant quand il était partit, et elle était maintenant une adulte. Mais elle aurait voulu qu'il en soit ainsi. Qu'elle n'ait rien à dire, car elle ne savait pas vraiment que dire. Et si jamais ce n'était pas lui ? Elle en était sûre, mais l'était-elle assez ? « A dire vrai j'aurais bien aimé être ailleurs moi aussi » - « Vous devriez partir si vous le pouvez dans ce cas »

Elles étaient loin les belles retrouvailles espérées. Elle le savait maintenant, ils n'auraient ni réunion, ni embrassades, ni souvenirs d'enfance partagés, ni même de nouvelles à s'échanger. Elle n'arrivait pas à lui demander ce qu'elle avait à lui demander, éprise d'une peur qu'elle dont elle ne saisissait pas la source, emprise d'une honte aux multiples raisons, celle d'avoir tort et de paraître pour une imbécile même si dans ce cas là elle ne le reverrait jamais, celle d'avoir raison et d'être une sotte car il ne voudrait pas les revoir, celle d'avoir raison et de n'être qu'une petite fille stupide car ce ne serait pas une bonne personne. Ça et encore bien d'autres. Jusque là elle n'y avait pas pensé, déjà bien trop tracassée par le simple fait d'aller lui parler. Mais maintenant que c'était bon, qu'elle l'avait fait, elle n'avait plus qu'une envie, repartir. « Tu as raison, je devrais sûrement partir. Je... » Elle s'arrêta, puis reprit. « Je ne devrais même pas être là » Elle se tourna vers lui, mais il ne la regardait pas. Sûrement la prenait-il pour l'un de ces opportunistes lui tournant autour comme des vautours. « William » Il se tourna vers elle. « Encore mes félicitations pour ce mariage, ça n'en a peut être pas l'air là maintenant mais c'est un bon mariage tu sais. » Il sourit faiblement mais elle ne sut dire s'il était réellement sincère ou juste ironique et il termina le fond de son verre. « Tu ne devrais pas boire autant » Une phrase qu'elle avait l'habitude de sortir quotidiennement à leur père, et de menacer souvent à leur frère, utilisant leur père comme un exemple à ne pas suivre, antimodèle. Perplexe, il semblait valser entre interrogation et curiosité, comme s'il tenait le début du fil qu'elle avait laissé derrière elle, mais qu'il n'arrêtait pas de le laisser filer entre ses doigts avant de le récupérer à nouveau, et de le refaire tomber. Mais elle avait lâché son côté du fil et ne le vit pas, faisant déjà un pas pour s'écarter. Elle n'avait fait que deux ou trois mètres à peine quand il l'interpella. « Mais qu'est-ce que vous me voulez au juste ? » Elle se retourna vers lui, un demi-sourire aux lèvres. « Je suis à la recherche d'une certaine personne, on m'a dit pouvoir la trouver ici, j'aurais espéré que tu pourrais peut être m'aider » - « Et qui est cette personne au juste ? » - « William. William Langham » Elle s'arrêta, comme si elle voulait reprendre sa respiration après un effort difficile, car ça l'avait un peu été, en tout cas ça avait été dur. Nage à contre courant, elle venait d'avancer à l'instar de tout ce que lui criait sa raison, elle lui disait de ne pas le faire, et elle le faisait. « Si jamais tu le vois, dis lui que sa sœur le cherche » - « Elais ? » Elle sourit, réellement, sincèrement. Et elle fit oui de la tête.




Spoiler:
Revenir en haut Aller en bas

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
  :: 
- vivendale -
 :: 
la vieille ville
 :: 
la haute-tour
 :: 
la galerie
-