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L'après coup | Aaron Bushby, Serena de Lavis

Alessandra de Marbrand
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Ven 10 Avr - 0:34



l'après coup

― afterthought ―



NOM DES PARTICIPANTS - Aaron Bushby, Serena de Lavis
DATE DU RP - Juillet 1302
DESCRIPTION - Elle ne rentrerait jamais chez elle, elle le savait, mais combien de temps passerait-elle loin des siens, des années, ou peut être seulement quelques jours, le temps pour elle de trouver la mort. Et entre le chaos d'une ville qui se gangrène d'un étrange Mal et la haine qu'elle inspire à ceux qui y tirent les ficelles, il lui sembla alors que sa fin ne tarderait pas. Peut être même échapperait-elle à ses épousailles. Mais elle est le fil fragile qui tient l'alliance bancale entre son peuple et le leur, et la reine ne la laissera pas tomber dans la gueule du loup, du moins pas sans protection.
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Alessandra de Marbrand
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Jeu 16 Avr - 23:37



serena de lavis

― decadence ―



Huit jours s'étaient écoulés depuis le départ de son frère. Et depuis, elle n'aspirait qu'à se dissoudre, se dissimuler, se désintégrer, disparaître. Elle dormait, s'éveillait en larmes, se rendormait, parfois le sommeil se refusait à elle et elle restait tapie sous ses couvertures à attendre. Plusieurs fois par jour, on lui emmenait ses repas, mais la vue de la nourriture lui était insupportable. Les plats s'empilaient, à peine touchés, et s'avariaient jusqu'à qu'on s'avisât de les remporter. Et alors qu'un jour elle se décida à se lever pour ne serait-ce qu'ouvrir les volets elle se sentit, sans raison apparente, oppressée, son cœur se mit à battre à tout rompre, si fort qu'elle cru que c'était celui de quelqu'un d'autre. Elle s'assit par terre, les genoux ramenés contre sa poitrine et attendit que le son des battements faiblissent, mais il lui sembla alors qu'ils ne faibliraient jamais, pire encore, ils redoublaient, et s'approchaient. Ça y est, je meurs, se dit-elle, sans que cette idée ne lui semble terrible mais au contraire, réconfortante. La seule contrariété qu'elle trouvât fut qu'elle trouverait la mort ici, dans ce trou à rat qu'elle excrétait, plutôt que chez elle. Non, non, se dit-elle, pas ici. Elle voulait rentrer, revoir ses frères, ses sœurs, ses cousins, cousines, ses neveux et nièces, retrouver le collège des mages, se baigner dans le fleuve les jours de forte chaleur avec les autres habitants de la capitale, ça et tant d'autres choses. Et puis, elle avait peur qu'en mourant ici, ses dieux ne puissent la retrouver et la ramener parmi ses ancêtres dans l'au-delà. Non, elle ne pouvait pas mourir, pas maintenant, et surtout pas ici.

Et pour la première fois depuis le départ de son frère, elle dormit d'un sommeil dénué de mauvais songes et cauchemars. Lorsque le matin pointa son nez, elle se retrouva allongée à même le sol, le moindre de ses muscles endoloris et le froid lui mordait chaque parcelle de sa peau jusqu'à lui ronger l'intérieur. Elle couru jusqu'à son lit pour s’emmitoufler dans ses couvertures qu'elle frottait vigoureusement contre elle, tentant tant bien que mal de se réchauffer. Elle arrêtait enfin de grelotter lorsque la porte s'ouvrit. Encore un plat que je ne toucherais qu'à peine, pensa-t-elle, elle avait tort.

En descendant l'escalier, elle s'efforça de ne pas trop penser à ce qu'il allait se passer. Elle ne savait pas vraiment pourquoi on l'a faisait déplacer à nouveau, d'abord ils lui avaient fait quitté les appartements qui leur avait été donné à leur arrivée après le départ de son frère et de sa suite, car ils étaient dans l'aile des invités et que sa présence serait permanente, pour l'emmener dans une chambre exiguë dans une autre aile, une solution temporaire l'avait-on rassuré, le temps que ses appartements soient prêts. Le temps pour eux qu'ils me fassent épouser un des leurs et me pousser dans sa chambre pour faire de la place, songea-t-elle avec dégoût. Sur son chemin, elle croisa deux servants qui parlait d'un ton grave. Ils étaient tellement pris dans leur discussion qu'ils ne firent pas attention qu'ils n'étaient pas seuls et continuèrent à vive voix leur échange. Ce mal, c'est de pire en pire - Ils savent pas ce que c'est, ni comment l'guérir - Non jamais Vivendale n'a connu un tel mal, moi j'pense que c'est ceux de Témère qui nous l'ont refilé cette saloperie - Eux pensent que c'est nous. « De quoi parlez-vous ? »  

Sa main courait sur la rampe alors qu'elle descendant les marches d'un pas encore plus lent. Il lui semblait que la sensation qu'elle avait eu la veille, celle qu'elle allait se dissoudre, revenait. Elle s'arrêta un instant, s'appuyant de ses deux mains sur la rambarde. L'escalier en colimaçon lui paraissait être une spirale qui tournait, tournait, tournait, tombait, tombait. D'un mouvement brusque elle releva la tête et recula, fermant les yeux quelques instants en soufflant bruyamment. Lorsqu'elle retrouva ses esprits elle entreprit de dévaler les marches à toute vitesse, et alors qu'elle était presque en bas, elle aperçut que son escorte était déjà là et elle s'arrêta brusquement, espérant que personne n'est remarqué sa précipitation. Et alors elle descendit les dernières marches d'un pas encore plus lent qu'au début. Son escorte était composé des deux femmes qui lui avaient été attribuées pour lui servir repas, bassines d'eau et vêtements, bien qu'elle n'acceptât jamais ses derniers, refusant catégoriquement de se parer autrement qu'avec les robes qu'on lui avait faite à Lavis. Avec ses deux femmes se trouvait un homme qu'elle ne connaissait pas, grand, chevelure brune, de sa posture droite et des mains croisés dans son dos elle devinait qu'il était soldat, ou du moins l'avait été à un moment de sa vie. Il est sûrement l'un des gardes de la reine, se dit-elle non sans dégoût, elle veut remplacer ceux qu'elle m'a ôté. « Je ne veux pas de leur garde » fit-elle à l'intention de ses dames, « si la reine s'inquiétait de ma protection elle n'aurait pas dû se débarrasser des mes gardes personnels » Et finalement elle se tourna vers l'homme qu'elle ne connaissait pas. « Sans vouloir vous offenser, bien évidemment » dit-elle en ponctuant sa phrase d'un sourire. « Vous ne faîtes qu’obéir aux ordres, mais dîtes moi plutôt, quels sont-ils ? »

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Seyrane de Larant
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Dim 19 Avr - 0:24





aaron s. bushby

― a seven nation army couldn't hold me back ―



Lorsqu'il quitta le logement que Katharina lui avait assigné, Aaron était d'humeur splendide. Le soleil se levait tout juste sur ce qui s'annonçait une belle journée de juillet à Vivendale. Plus de sept mois s'étaient écoulés depuis l'installation des Témériens dans la ville conquise, et les choses s'étaient enfin stabilisées. Le guerrier avait même commencé à s'ennuyer un peu, mais la souveraine aux cheveux d'argent venait de lui attribuer une nouvelle mission : la protection d'une invitée de la couronne, une héritière lavienne. Aujourd'hui, elle déménageait pour retourner à la Haute-Tour, où la surveillance pouvait s'exercer avec plus de précision et d'efficacité. Il s'agissait autant de protéger que de contrôler ce précieux atout pour la couronne. Un atout qui, on l'avait averti, était plutôt de nature rebelle. Un sourire amusé dérida son visage ; enfin un peu d'animation, loin des manigances politiques et des secrets de corridors. Aaron n'était définitivement pas homme de gouvernement; sa place était sur le champ de bataille. Cependant, il savait pertinemment qu'une certaine adaptation était requise : la phase de conquête achevée, d'autres attentes et nécessités voyaient le jour et s'il voulait continuer à faire partie de l'entourage de Katharina, il lui fallait être capable d'y répondre.

Marchant d'un pas vif dans les rues peu fréquentées, le jeune homme pensa que l'activité militaire pourrait reprendre plus vite que prévu. Les rumeurs d'une épidémie couraient comme des rats le long des murs, et le cliquètement des armes rebelles ne semblait pas bien loin non plus. Mais aujourd'hui, ces perspectives peu réjouissantes ne parviendraient pas à lui ôter le sourire. En tout cas, c'est ce qu'il pensait. Au fur et à mesure qu'il se dirigeait vers le cœur de Vivendale, les rues se remplissaient et la populace se faisait de plus en plus agitée. L'inquiétude grandissait chez les Nordiens. Les théories les plus farfelues se répandaient comme de la poudre : certains pensaient qu'après les avoir conquis, les Dorhéens cherchaient à les exterminer ; d'autres, qu'il s'agissait d'un châtiment suprême pour une ville délaissée par les dieux. Les rangs de l'armée royale n'étaient pas épargnés par la fébrilité. Aaron ne s'inquiétait pas outre mesure de la maladie en elle-même ; pour l'instant, le nombre de cas était réduit. Par contre, la perspective d'une population échauffée, qu'un rien suffirait à embraser, le préoccupait davantage. Et ce rien trouverait facilement son origine dans les rancœurs qui subsistaient à l'égard de son peuple. Or le désordre, la contestation et la violence s'entretiennent mutuellement ; de là au chaos généralisé, il n'y avait qu'un pas.

Ces perspectives alarmantes altérèrent quelque peu les bonnes dispositions du jeune homme. Il n'était plus qu'à quelques rues des décombres du Mur qui séparait autrefois la cité de ses faubourgs. Au détour d'une rue plus étroite, il crut voir un attroupement et revint sur ses pas. Une femme d'âge indéfinissable, les tempes grisées par ses cheveux ramenés en chignon, haranguait les passants depuis une estrade formée par des cageots. Aaron s'approcha discrètement. Un petit groupe de Nordiens était agglutiné et semblait s'abreuver des paroles hargneuses de l'oratrice. Dans le style le plus pur de la rhétorique populaire, la femme s'arrêtait de temps à autre pour s'adresser à son audience, exigeant son approbation à coup de phrases enfiévrées. Et celle-ci répondait bien volontiers, ponctuant le discours d'approbations bruyantes et enthousiastes. Le soldat ne chercha pas davantage à savoir ce qui se disait, tourna les talons et s'éloigna à grandes foulées vers sa destination. La fièvre montait de jour en jour, peut-être même d'heure en heure.

Aaron fut introduit dans la bâtisse qui servait de domicile à Serena de Lavis. Il attendit au pied du bel escalier en pierre qui menait aux appartements. Les deux dames de compagnie de la princesse se joinrent à l'attente, silencieuses. L'objet de sa mission finit par paraître, nimbée de l'aura imposante dont les puissants de ce monde accompagnent leur présence. Il s'agissait d'une auguste jeune femme dont le teint et les cheveux sombres évoquaient à coup sûr les peuples de Lavis. « Je ne veux pas de leur garde, si la reine s'inquiétait de ma protection elle n'aurait pas dû se débarrasser des mes gardes personnels. » Aaron dissimula un sourire en inclinant légèrement la tête en guise de salut, lorsqu'elle se tourna dans sa direction. Il sentait son humeur fringante revenir. « Sans vouloir vous offenser, bien évidemment. Vous ne faîtes qu’obéir aux ordres, mais dîtes moi plutôt, quels sont-ils ? » Le guerrier composa une figure de marbre et répondit avec autant de sérieux que faire se peut. « La souveraine souhaite que vous changiez de gîte, princesse Serena. Et comme les rues de Vivendale sont quelque peu... animées en ce moment, elle a ordonné que vous soyez accompagnée pour ce changement. Par moi. »  Il s'était bien gardé de mentionner la nouvelle destination. Katharina l'avait prévenu qu'il rencontrerait probablement des résistances.

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Ven 1 Mai - 18:44



serena de lavis

― deception ―



L'or des chaînes aux cous rutilaient sur le blanc nacré des soieries. Les cheveux étaient ramenés en un enchevêtrement complexe de boucles et d'épingles, une partie était épinglée à l'arrière du crâne, l'autre tombait sur les épaules et le dos. Les pierres pendaient aux oreilles et ornaient les doigts. A côté de tels atours, il lui semblait paraître bien austère, dans sa simple toilette de coton et ses sandales de cuir. Elle n'avait eu ni le temps ni l'envie de faire quelconque effort, s'étant simplement contentée de l'eau d'une bassine pour se rafraîchir, ses cheveux tombaient négligemment sur ses épaules, sans boucles ni épingles, elle n'avait ni bijoux ni tissus raffinés sur elle. A quoi bon, pensa-t-elle, se passer d'aussi belles soieries dans de tels lieux, quel gâchis. Bas de plafond et sombre, si sombre, dès l'instant où elle avait mis les pieds en ces lieux, elle n'avait voulu qu'en déguerpir. La pierre y était froide, tout comme ces gens. Elle aurait tant aimé que le soldat l'accueille avec un sourire et lui dise qu'il la ramenait à la Villa de Pistoia, que comme la propriété appartenait à sa famille, elle avait droit d'y rester jusqu'à ses épousailles. Elle aimait tant la Villa de Pistoia, plus qu'une villa, une minuscule ville dans une ville, une somptueuse bâtisse vieille d'un demi millénaire. L'architecture était sans pareille, une union aussi inattendue qu'harmonieuse entre deux arts si différents. Toute en colonnes et espaces ouverts, ponctués de nombreux points d'eau, l'un d'eux, le plus grand, presque un lac, était surmonté d'un temple niché sur une monceau de terre perché au dessus de l'eau, on ne pouvait y accéder qu'avec une barque bien que seulement quelques coups de rames permettaient d'arriver sur l’îlot. Mais le plus beau restait l'intérieur, les murs arboraient des fresques d'une rare magnificence, dépeignant des histoires qu'elle ne connaissait pas, et d'autres, qu'au contraire, elle connaissait par cœur. Une union réussie, à bien des égards, pensa-t-elle, mais trop peu connue, voire oubliée. La construction avait été commanditée par le roi Henri l'Ancien, un cadeau pour son épouse, la reine Athaleen de Lavis, pour qu'elle puisse avoir un endroit à elle qui puisse lui rappeler ses terres d'origines dans l'austère capitale. Leur mariage avait été une alliance politique, mais un mariage d'amour, se dit-elle, mon futur mari ne me montrera pas une telle dévotion.

Oui, elle aurait voulu retourner là-bas, mais si cela avait été le cas, jamais il ne l'aurait forcé à venir ici dans un premier temps. Non, ils l’emmèneraient ailleurs. Mais où ? Et pourquoi ? Elle ne pouvait répondre à ces questions, bien qu'elle ait une petite idée sur la deuxième interrogation. « Elles sont animées à cause de ce mal » commença-t-elle d'un ton qu'elle aurait voulu un peu moins tranchant qu'il ne l'était en sortant de sa bouche, « c'est ce que vous vouliez dire n'est-ce pas, ce mal met la folie dans la tête de la moitié des habitants, et l'autre moitié se blâme entre eux pour qui en est la cause » Elle ponctua sa phrase d'un sourire. « Mais vous n'arrivez pas à contrôler ce chaos. » Les deux hommes de cuisine qu'elle avait croisé dans les escaliers ne lui avait dit que quelques mots, mais ils avaient été riches d'utilité. « Mais au lieu de mettre dans les rues toutes leurs ressources à leur disposition, je vois qu'ils sont prêts à gâcher un de leur homme dans une tâche inutile, » elle haussa les épaules, « ça ne doit pas être si terrible qu'on dit dans ce cas » Et tout en achevant sa phrase, elle se détourna d'un pas et le jaugea lentement. Il était un homme plutôt grand, d'une carrure qu'elle devinait imposante sans pour autant qu'il ne soit gros. Il était accoutré d'épais cuir bouilli d'une grande simplicité, sans ornements ni autres parures, et pourtant, il dégageait en lui cette même impression de puissance que les haut-gradés. Il était peut être commandant, général ou autre maîtres d'armes. Il avait une chevelure et une barbe bien fournies, le tout de la même couleur que ses yeux... et aussi que son armure, un brun semblable au cuir. Ou bien étaient-ils bleus, ses yeux, elle n'arrivait pas à trancher, il faisait trop sombre. Et puis sa peau était pâle, moins que celle des deux suivantes qui étaient déjà reparties, mais bien plus que la sienne. Il était grand, certes, fort, certes, mais il ne ferait pas l'affaire. « ou alors la situation est pire qu'on le prétend et la tâche n'est pas inutile mais vouée à l'échec, comment peut un seul homme assurer ma protection si les rues sont réellement empruntes par le chaos ? » Elle s'arrêta et planta son regard dans le sien. « Et puis, vous ne m'avez pas dit ser, où allons-nous ? » Ce n'était pas la villa, elle en était certaine, elle pouvait deviner la réponse, mais elle voulait l'entendre de sa voix à lui. « Ser c'est bien ça ? Vous avez omis de vous présenter mon brave, c'est horriblement malvenu comme manière » En réalité, cela lui importait nullement, mais elle prenait un certain plaisir à lui être désagréable, juste parce qu'il était un des hommes de la reine. « Mais bon, peut-on s'attendre à autre chose de la part d'un témérien, vous autres vous ne savez pas vous tenir et n'avez du respect pour rien, vous n'êtes même pas capable de vous adresser à moi de manière correcte. Je ne suis pas votre princesse Serena, mais princesse Serena de Lavis, ou Vôtre Grace. »




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Lun 1 Juin - 16:33





aaron s. bushby

― the mission ―



Sur le chemin qui le mena à la résidence actuelle de Serena de Lavis, Aaron n'avait pas beaucoup réfléchi à la jeune femme. Si sa souveraine l'avait brièvement mis en garde, il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre et avait préféré ne pas chercher davantage à savoir. Le Témérien n'était pas homme de spéculation. Quoi qu'il ait pu espérer de la princesse, il n'était pas déçu. Elle semblait en ébullition, et à chaque instant l'animosité qu'elle manifestait à l'égard de tout ce qui l'entourait menaçait de se transformer en rage débordante, tantôt glacée, tantôt brûlante. « Elles sont animées à cause de ce mal, c'est ce que vous vouliez dire n'est-ce pas, ce mal met la folie dans la tête de la moitié des habitants, et l'autre moitié se blâme entre eux pour qui en est la cause. Mais vous n'arrivez pas à contrôler ce chaos. » Le soldat ne cilla pas. Bien informée, pour une invitée tenue captive. « Mais au lieu de mettre dans les rues toutes leurs ressources à leur disposition, je vois qu'ils sont prêts à gâcher un de leur homme dans une tâche inutile, ça ne doit pas être si terrible qu'on dit dans ce cas... ou alors la situation est pire qu'on le prétend et la tâche n'est pas inutile mais vouée à l'échec, comment peut un seul homme assurer ma protection si les rues sont réellement empruntes par le chaos ? » Il se garda bien de relever. Même si les desseins de Katharina lui échappaient, il savait la femme aux cheveux d'argent dotée d'un formidable esprit de stratège. Elle était comme une joueuse d'échec, menant toujours le jeu avec un coup d'avance. Il l'avait vue à l'œuvre. Ce brillant cerveau était peut-être occupé par l'épidémie, mais cela ne l'empêchait pas de faire avancer ses intérêts sur le reste de l'échiquier ; et dans ce but, Serena de Lavis représentait certainement un atout de grande valeur.

La princesse devait également être rompue aux arts de la négociation, puisque, n'obtenant aucune réaction à une question purement rhétorique, elle entreprit d'attaquer de front. « Et puis, vous ne m'avez pas dit ser, où allons-nous ? » Il croisa son regard. « Ser c'est bien ça ? Vous avez omis de vous présenter mon brave, c'est horriblement malvenu comme manière. Mais bon, peut-on s'attendre à autre chose de la part d'un témérien, vous autres vous ne savez pas vous tenir et n'avez du respect pour rien, vous n'êtes même pas capable de vous adresser à moi de manière correcte. Je ne suis pas votre princesse Serena, mais princesse Serena de Lavis, ou Vôtre Grace. » Fidèle à lui-même, Aaron ne broncha pas et se contenta de répondre d'un ton égal. « Je vous prie de m'excuser, Votre Grâce. Je suis Aaron Bushby, soldat de Sa Majesté et ancien membre de sa garde personnelle. » Il inclina légèrement la tête et poursuivit. « Maintenant, si vous voulez bien me faire l'honneur de m'accompagner, nous devons nous mettre en route. » Il pivotait déjà vers la porte lorsqu'une pensée sembla le retenir et il leva de nouveau le regard sur son interlocutrice. Bien que la cohabitation avec les Étrangers ait accoutumé les Nordiens à une plus grande diversité physique, les cheveux sombres et le teint couleur olive de la jeune femme attireraient l'attention. « Pouvez-vous faire appeler une de vos servantes et lui demander un châle pour vous couvrir ? Il vaudrait mieux être discrets. »  ajouta-t-il d'un ton sans appel. Une fraction de seconde, il s'interrogea sur ce qu'il ferait si la princesse refusait d'obtempérer. Katharina n'avait pas parlé d'une mission diplomatique, et chaque minute qui s'écoulait voyait les rues s'emplir davantage, rendant la mission plus périlleuse. Le comportement imprévisible de sa protégée était presque plus une source d'inquiétude que les troubles potentiels qu'ils rencontreraient dehors.

Quelques minutes plus tard, ils quittèrent la résidence ; elle, enveloppée d'un léger voile qui dissimulait sa chevelure distinctive, lui sur ses talons, une main sur la garde de l'épée. Leur point de départ était situé dans un quartier relativement calme et isolé, mais il leur fallait traverser une bonne partie de la cité pour parvenir à la Haute-Tour. Ils empruntèrent d'abord plusieurs rues peu fréquentées. À cette heure matinale, l'activité était usuellement concentrée sur la zone du marché ; en choisissant ce moment, le soldat espérait ainsi éviter le gros de la foule. Cependant, au fur et à mesure qu'ils s'approchaient du centre-ville, le nombre de personnes affluant dans la même direction qu'eux allait croissant. La plupart semblait être des Nordiens issus des quartiers populaires. Une atmosphère électrique régnait dans l'air ; d'habitude, Aaron n'aurait su dire s'il s'agissait d'allégresse populaire ou de colère refoulée. Mais au vu des récents évènements, il penchait plutôt pour la seconde option. L'avantage, c'est qu'au milieu de ce peuple agité, personne ne prêtait trop attention à eux. Le Témérien guidait la brune entre les chariots des vendeurs ambulants, l'esprit mobile, les sens aux aguets. Ils étaient loin d'être arrivés.


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Ven 12 Juin - 1:21


serena de lavis

― deception ―



Au matin de son départ, son frère était venu la voir. Ils ne s'étaient pas reparlés depuis la gifle qu'il lui avait asséné lors de leur dispute, c'était la première fois qu'il avait jamais osé lever la main sur elle, et ce sera la dernière, s'était-elle alors promis. Faisant comme si de rien n'était, il l'avait embrassé sur les deux joues, « Notre avenir à tous repose en partie sur tes épaules, » dit-il en posant ses mains sur ses épaules, « ne l'oublies jamais. » et une larme coula sur sa joue. Jamais avant cela elle ne l'avait vu verser une seule larme, pas même à la mort de leur père. Car ce ne sont pas des larmes de tristesse pensa-t-elle, seulement de culpabilité, il s'en veut pour ce qu'il me fait. « Ne pleure pas mon frère, » et du bout du pouce, elle essuya la larme sur la joue de son frère, « il n'appartient qu'à moi de verser ses larmes, car moi seule suis condamnée. » Pendant des jours, elle s'était raconté des centaines de mensonges à elle même pour tenter de se rassurer, mais à présent elle en avait la certitude, elle était foutue.

Elle n'avait eu d'autres choix que d'obtempérer, comme là. Et même si l'idée de lui désobéir était très alléchante, un simple coup d’œil à l'homme en face d'elle suffisait à la refroidir. Oh qu'elle en avait entendue des choses la Serena, sur les témériens, qu'ils étaient des barbares, qu'ils étaient violents, imprévisibles, injustes et cruels. A en croire ce qu'on disait, l'homme pourrait aussi bien la jeter sur son épaule et la trimbaler dans toute la ville comme un vulgaire sac, faisant fi des manières. Alors, lorsqu'il se corrigea avant de l'inviter à la suivre, elle jugea bon d'obtempérer. Ils étaient prêts à partir lorsqu'il se retourna à nouveau vers elle et la jaugea. Au fond d'elle, elle tremblait. A quoi pensait-il ? Qu'allait-il lui faire ? Et puis il lui demanda simplement de se couvrir pour éviter d'attirer les regards et elle se détendit d'un coup. « Oh, » fit-elle, soulagée, « je vois. » Elle retourna vers le bas de l'escalier et appela pour ses deux suivantes, se trouvant bien gênée de pas se rappeler de leur nom, elle se contenta d'hausser la voix en demandant une cape ou un voile qu'elles trouveraient dans ses affaires en espérant en son fort intérieur qu'une d'elles l'entendrait, lui évitant le malaise supplémentaire de devoir se mettre à crier. Les dieux répondirent à ses prières et on lui apporta un voile qu'elle passa autour de ses cheveux. « Nous pouvons y aller, » plus une question qu'il affirmation mais il ne dit rien, se contentant d'avancer vers la porte, une main déjà posée sur la garde de son épée. Tout ira bien, tenta-t-elle de se rassurer, et elle passa la porte.

Huit jours s'étaient écoulés depuis qu'elle avait été enfermée ici, huit jours sans pouvoir sentir le vent fouetter sa peau ou bien le soleil chauffer son visage. Elle ferma les yeux et inspira longuement. Le temps d'un instant elle aurait pu s'y croire, chez elle, une illusion aussi éphémère qu'amère. Ils s'en allaient de rues en rues, d'abord désertes, bientôt moins désertes. A force d'affluence, Serena se rapprocha de plus en plus de son protecteur, brisant la distance qu'elle était s'était imposée entre eux. Elle avait peur que quelqu'un ne passe entre eux, ne les bouscule ou peu importe quoi d'autres et qu'ils finissent pas être séparés. Elle ne voulait pas se retrouver seule là-dedans. A la volée elle avait entendue des choses, des plaintes...des prédications. Alors qu'ils dépassaient les dernières échoppes, la foule qu'ils traversaient devenait peu à peu comme un seul homme statique. La rue où s'était entassé les derniers marchants s'ouvrait sur une petite place qui descendait sur une bâtisse en contrebas qui semblait tout d'une église. Face à la porte de cette bâtisse, un homme prêchait son discours. Elle reconnu alors les bribes qu'elle avait entendu quelques instants plus tôt, de loin, c'était lui, lui et ses fidèles. Elle s'arrêta un instant, elle voulait le voir, et l'entendre. Jamais avant n'en avait-elle vu, un prédicateur. Il parlait du mal, de la maladie, des dieux les testant, punissant, sauvant, elle n'aurait su dire. Peu enclin à faire une pause dans leur avancée, Aaron tenta de la tirer doucement par le coude mais elle se dégagea aussitôt. « Je veux entendre ce qu'il a à dire. » Et puis le prédicateur continua. Oh qu'il semblait simple, de céder à ces autres, mais céder était, d'après lui, se renier pour une vie de mensonges. Et c'est le mensonge, enchaîna-t-il presque dans un cri, qui a engendré tout ceci, peut être pensiez-vous bien faire alors, nourrir vos familles, avoir un toit sur vos têtes, mais ça avait été une trahison envers leurs souverains ultimes que de faire une telle chose. Maintenant il fallait réparer ses erreurs, se soulever et se battre pour reprendre leur ville et apaiser les dieux. Ainsi, alors, pourraient-ils espérer voir un jour la fin de ce mal. Les cris et acclamations s'élevèrent comme un seul homme, certains brandissaient des fourches, des bâtons, des torches. Il lui sembla alors que tous criaient trop fort et se mouvaient trop vite. Il fallait qu'ils partent d'ici, pensa-t-elle, maintenant. Trop tard. Avant même de se rendre compte qu'on l'avait bousculé elle était déjà à terre, dans sa chute Aaron l'avait rattrapé par le bras et relevé presque aussitôt ou bien était-ce elle qui lui avait attrapé la main bien avant de tomber puisque il lui semblait sentir la chaleur dans sa paume depuis plus longtemps. Elle ne savait pas, elle ne savait plus. La seule chose qu'elle savait c'est ce qu'elle pouvait voir là, au sol, son voile, tombé, son visage, dévoilé.

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Lun 20 Juil - 13:49




Aaron S. Busby

― the mission ―



« Je veux entendre ce qu'il a à dire. » Aaron leva les yeux au ciel et, dans un effort pour masquer son impuissance, emboîta le pas à la jeune femme, dont la fermeté résolue ne tarderait pas à les perdre. Il n'osa pas insister et l'entraîner de force ; ce qu'il avait aperçu de son caractère laissait à penser qu'elle serait capable de provoquer une scène en pleine rue. Il prit donc son mal en patience et jeta un coup d'œil inquiet à l'homme qui prêchait face à l'église. Le changement de registre par rapport à l'évènement similaire vécu le matin était saisissant. Si l'oratrice de toute à l'heure semblait hargneuse, le prédicateur de l'instant était véritablement exalté. C'était bien la ferveur religieuse qui animait la voix de ce fanatique, et armait le bras de ses dévots, le culte se substituant alors à l'injustice sociale et à la conquête comme motif d'insurrection. L'allocution touchait à sa fin, les fidèles en délire communiaient dans une sorte de frénésie mystique et un réflexe traversa Aaron comme une décharge ; il fallait partir. Mais déjà la foule s'éparpillait et les deux étrangers se trouvaient pris dans son tumulte. Serena fut projetée à terre dans la bousculade, et il s'en fallut de peu pour qu'elle soit écrasée sur le pavé par les Nordiens déchaînés. Le soldat l'aida à se relever, mais son voile avait été arraché et emporté par le mouvement des corps. Au milieu du désordre, sa beauté était encore plus frappante qu'entre les pierres grises de la résidence, et elle ne manquerait pas d'attirer l'attention. Mais ils n'avaient plus le temps de réfléchir à ce problème, et Aaron, gagné par l'instinct de survie, lui enserra fermement le bras, plus pour éviter de la perdre que pour entraver ses mouvements, et l'entraîna à sa suite. Pendant plusieurs centaines de mètres, ils furent portés par l'élan de la multitude, et le brun se contenta de se frayer un passage entre les gens agglutinés.

À la première occasion, ils s'engouffrèrent dans une ruelle sur la gauche et s'arrêtèrent quelques pas plus loin pour reprendre leur souffle. « Tout va bien ? » demanda Aaron qui ne s'embarrassait déjà plus des formules dictées par l'étiquette. La jeune femme semblait secouée mais tenait le coup, fidèle à la réputation de son peuple. Ses traits étaient toujours empreints de l'auguste noblesse attachée à son rang ; seules ses pupilles sombres trahissaient une certaine fébrilité. « Ne vous inquiétez pas, nous ne sommes plus très loin. » Le soldat s'attendait à ce que les rues soient agitées, mais pas en proie à un tel élan révolutionnaire. Cela n'augurait définitivement rien de bon pour Katharina. Il secoua la tête. L'heure n'était pas à de telles réflexions, surtout que la reine ne le payait pas pour se mêler de politique mais pour protéger la princesse lavienne. « Nous devrions nous remettre en chemin. » déclara-t-il, autant à son intention qu'à celle de Serena. Un coup d'œil sur la gauche lui apprit que l'artère qu'ils avaient quittée continuaient à charrier des centaines d'individus révoltés qui accouraient vers le centre du pouvoir, qui se trouvait être également leur destination. Le brun fit la moue. Il était désormais hors de question d'accéder à la Haute-Tour par la porte principale ; il leur faudrait emprunter un passage dérobé. Ils partirent donc d'un pas vif dans la direction opposée.

Le duo traversa plusieurs ruelles en enfilade, toutes plus étroites les unes que les autres, avant de déboucher à nouveau sur une rue plus large. Cette artère commerçante n'avait pas encore été visitée par la foule vengeresse, et les vendeurs s'affairaient tandis que quelques riches habitants faisaient leurs emplettes. Sans ralentir le pas, les deux jeunes gens entreprirent de remonter l'avenue vers le centre. La Haute-Tour se profilait à quelques centaines de mètres. Aaron pensa avec soulagement que l'effervescence de la population avait détourné la princesse de ses velléités rebelles. Il adressa une prière silencieuse pour qu'elles ne lui reviennent pas à l'esprit avant l'arrivée. Ainsi absorbé par ses pensées, le soldat ne remarqua que distraitement la silhouette enveloppée d'une toile sale et recroquevillée contre la pierre, quelques pas devant eux. La guerre avait décimé tant de familles et de commerces que les mendiants étaient légion dans les rues de la capitale. Juste avant de passer devant cet individu resté à la périphérie de sa conscience, néanmoins, Aaron eut un pressentiment et chercha des doigts le poignard glissé contre son buste. Soudain, la silhouette se déplia comme un ressort et Serena eut un cri de surprise. Le mendiant l'avait agrippée par le poignet et tentait de lui arracher la bague de facture lavienne qu'elle portait. La toile repoussée révéla une paire d'yeux fiévreux, enfoncés dans un visage famélique. Le brun fit volte-face. L'homme en haillons l'avait saisie à la gorge. Malgré ses membres décharnés, sa stature et son emprise sur Serena indiquaient qu'il avait un jour eu de la force. Il avait lâché la bague et la toisait désormais d'un regard où l'on ne lisait plus que folie rancunière. « Saloperie d'Étrangers... Vous nous avez tout pris, hein... Et maintenant vous nous laissez crever dans la fange... vous serez punis... »  Il n'acheva pas son propos car la lame d'Aaron, après avoir glissé entre deux côtes, avait perforé le poumon. Le corps s'affaissa sur lui-même jusqu'à heurter le sol. Le soldat ne se préoccupa pas de l'expression hébétée qui figeait le visage de la princesse, l'empoigna et l'entraîna à sa suite vers la Haute-Tour. Assez de péripéties pour la journée, pensa-t-il tandis qu'une idée insidieuse commençait à creuser son chemin dans son esprit. Et si Katharina avait voulu ça ?
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Alessandra de Marbrand
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Mer 19 Aoû - 21:48


serena de lavis

― the riot of vivendale ―


Ça bougeait et ça hurlait de tous les côtés et ils furent submergés par ce flot de tumultes et de cris. Ils allaient tous mourir sous les coups de la folie, c'était une punition divine qui s'abattait sur eux. Leurs dieux les avaient reniés après qu'ils aient ployé le genou face aux barbares. Ils devaient faire quelque chose. C'étaient leur faute, à eux, tous ces étrangers, c'étaient eux qui ramenaient ce mal. Non, cette fois ils ne se laisseraient pas faire. L'heure était au soulèvement, comme cent ans auparavant. Les fils qu'ils ont perdus lors du siège seraient vengés. La prostituée qui s'était accaparée le trône va tomber, elle et tous les fils de catin qui la suivaient, ils allaient tous payer. C'est contre eux, contre ceux d'en haut, qu'ils devaient faire face. C'est nous, contre ceux d'en haut, une clameur croissante qui s'élevait accompagnée de mouvements incompréhensibles, certains tentaient de reculer pour échapper à la tumulte de chair tandis que d'autres, au contraire, poussaient pour les rejoindre. Autour d'elle les hommes n'étaient plus vraiment des hommes mais des corps – à la fois vivants et inanimés – ou plutôt des parties de corps qui se rapprochaient, la touchaient, la heurtaient, un bras, une hanche, une épaule, parfois même elle en sentait contre ses pieds, par terre, piétinés par les autres. Ça aurait pu être moi, pensa-t-elle, s'il n'était pas intervenu elle aurait fini comme ces pauvres gens, en bas, tout en bas.

Les secondes s'écoulaient mais rien ne voulait retourner à sa place. Ni l'ordre, ni les hommes. Il leur fallait partir au plus vite mais les corps l'emprisonnaient. Aaron n'hésitait pas à pousser certains pour qu'ils puissent passer. Il l'entraînait, la tirait presque, parmi la foule, et pour une fois, elle se laissa faire sans broncher. S'il elle avait eu l'intention d'avancer d'elle même, en réalité elle n'aurait pas pu faire un pas, ses pieds lui semblaient lourds, au point qu'elle n'aurait pas pu faire un pas sans aide, son cœur lui paraissait être celui d'un autre qu'on aurait arraché de la poitrine de son propriétaire pour lui coller contre les oreilles. Elle avait l'impression que c'était comme la veille, qu'elle aurait pu se dissoudre. Et cette sensation ne la quitta réellement que lorsqu'ils s'arrêtèrent, une fois que toute cette folie n'était plus que derrière eux. Doucement, mais sans grande conviction, elle fit un oui de la tête alors qu'il lui demandait comment elle allait. Leur pause dans la ruelle lui permit alors de se recomposer, reprendre le masque après s'être plus tôt dépouillée d'un seul coup de la femme qu'elle était.

Lorsqu'il fut temps de reprendre la route, ils repartirent en sens inverse. Au fur et à mesure des rues, les murs autour d'eux se resserraient mais les sons de la foule, eux, s'éloignaient. Et puis ils finirent par atteindre une rue plus large, jonchée de commerces et d'une apparente normalité qui était des plus réconfortantes. Apparemment elle avait été épargnée par la masse qui avait dû remonter la rue principale sans s'étendre dans les rues adjacentes, même ceux qu'ils avaient vu fuir dans d'autres directions ne semblaient pas avoir atteint cet endroit. Et puis, ils n'étaient plus qu'à une centaine de mètre du palais. Il lui sembla alors que toute cette folie était derrière eux et elle aurait presque pu courir jusqu'aux portes tellement elle était soulagée de les apercevoir au loin.

Il lui attrapa la main, tirant sur ses doigts pour tenter d'attraper l'émeraude sertie d'or à son majeur, un bijou qu'elle avait eu de sa mère, un cadeau de son mari qu'elle voulait avoir avec elle jusque dans la mort, mais l'une des belle-sœurs de Serena l'avait retiré de son cadavre, clamant que la bague lui revenait de droit car il aurait dû revenir à sa mère à elle, la première femme de l'empereur et non à sa concubine. Ce jour là, les deux sœurs se battirent au point que si l'on ne s'était pas interposé entre elles, elles auraient pu se tuer. Et finalement c'était Darius qui avait repris la bague et lui avait donné, puisque Mérésânkh ne pouvait plus la récupérer, c'était à sa fille aînée qu'elle revenait lui avait-il dit lorsqu'il était venu lui rendre. Et depuis elle s'était promis que, comme sa mère, jamais l'émeraude ne quitterait son doigt, et comme sa mère, elle n'avait pas su tenir sa promesse.

Le tintement du métal contre la pierre sonna comme un glas pour l'homme. Il n'était plus question de piller une quelconque personne, à présent, pour lui, c'était personnel. Il l'a saisit à la gorge, écrasa la trachée sous ses doigts. « Saloperie d'Étrangers... Vous nous avez tout pris, hein... Et maintenant vous nous laissez crever dans la fange... vous serez punis... » La phrase et l'homme trouvèrent une fin prématurée, et l'homme s'affaissa au sol, comme un sac qu'on aurait jeté de sa hauteur. L'air entra dans ses poumons d'un seul coup, elle inspira avec tant d'ardeur qu'elle manqua de s'étouffer et fut prise d'une quinte de toux. A moitié pliée sur elle même, son regard se posa alors sur son agresseur. A présent il n'avait plus rien de menaçant, il était...vide, mort. Autour de lui, le sang venait peu à peu l'entourer, imbibant les haillons qui lui servaient de vêtements d'un rouge vermeil. L'une de ses mains posée contre sa gorge douloureuse, elle se redressa doucement et son regard vint croiser celui d'Aaron. « Merci » parvint-elle à murmurer péniblement.

A peine furent-ils à l'intérieur qu'elle se dépouilla, le peu de je-ne-sais-quoi qui l'avait fait tenir sur ses pieds jusqu'ici s'était tarit et elle se sentait se décomposer. Autour d'elle tout semblait aller trop vite et sonnait trop fort dans ses oreilles, lorsque d'autres gardes accoururent pour s'enquérir de leur état et de ce qu'il leur était arrivé, elle ne dit rien. Si elle avait voulu dire quelque chose, elle n'avait pas pu sortir un son, sa respiration s'accélérait et il lui sembla à nouveau manquer d'air, exactement comme lorsque l'homme l'avait agressé, et instinctivement elle porta une main à sa gorge pourtant libérée de tout étau. Elle eut un mouvement de recul et son dos trouva appui contre un mur contre lequel elle se laissa doucement glisser. Décadence. Lorsqu'elle finit par atteindre le sol, elle ramena les genoux vers sa poitrine et plaqua les mains contre sa bouche alors que son corps n'était qu'une alternance pénibles de spasmes, entre sanglots et hyperventilation. « J-je peux... » commença-t-elle d'une voix tremblotante, « ...j'arrive pas... » il y-avait comme un blocage dans sa gorge, obstacle à l'air comme au son, « ...je peux pas respirer »



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Seyrane de Larant
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Sam 3 Avr - 23:09





Aaron S. Bushby

― The Mission ―



Une fois franchies les murailles de la Haute-Tour, Serena et Aaron échouèrent au milieu d'une galerie déserte, le souffle court et le cœur battant. Leur entrée mouvementée n'était pas passée inaperçue et déjà des gardes s'approchaient d'eux. Le brun eut un instant d'hésitation. Le transfert de la princesse lavienne était censé se faire en toute discrétion, et Katharina avait requis d'être avertie dès l'instant où la prestigieuse invitée franchissait les portes de sa nouvelle demeure. La présence des gardes royaux ne lui plaisait guère. Il n'eut néanmoins pas le temps d'y penser davantage, car sa protégée s'était laissée glisser au sol et semblait gagnée par la panique. « Je peux pas respirer. » laissa-t-elle échapper entre deux spasmes. Aaron se tourna vers les gardes. « Retournez à vos postes. » Les deux hommes ne firent pas l'ombre d'un mouvement, bêtement absorbés par la vision de Serena qui s'étouffait. « Dehors! » Le ton était sans appel et les soldats s'exécutèrent.

Lorsqu'ils furent seuls, le soldat s'accroupit face à la jeune femme et chercha son regard. « Votre Grâce ? » Elle semblait projetée ailleurs, loin du silence solennel de la galerie, encore dans la rue sans doute, son corps secoué comme un écho au tumulte de la foule, la respiration entrecoupée. « Hé! » Tout son être se tendait vers la recherche d'air, à coup d'inspirations saccadées, mais était visiblement incapable d'en faire usage. Il lui attrapa le poignet : le pouls était frénétique, le cœur s'affolait. « Serena! » Son ton bourru eut au moins pour mérite de détourner un instant l'attention de la noble étrangère. « Nous sommes arrivés, vous êtes en sécurité. Respirez maintenant. »  Elle sembla reprendre un peu de contenance. Le regard était encore empreint de panique, mais bientôt son souffle reprenait en régularité. En l'espace de quelques instants, il la vit abandonner l'angoisse comme une dépouille désormais inutile, et recouvrer l'attitude altière qui était la sienne.

Aaron se releva rapidement et s'écarta de quelques pas : avec le calme revenaient insidieusement les conventions et la nécessité, toujours présente à son esprit, de ne jamais laisser de place au malentendu. Il détourna pudiquement le regard tandis que Serena reprenait ses esprits et embrassa la galerie d'un coup d'œil, juste à temps pour remarquer les deux gardes qu'il avait cavalièrement congédiés, arrivant d'un pas décidé. Il se tourna de nouveau vers la jeune femme. « Vite, levez-vous et ayez l'air aussi détaché que possible. Il ne s'est rien passé. »  dit-il précipitamment. Le soldat était soudainement pris d'un élan de loyauté envers sa compagne d'aventures. L'idée de la voir discréditée face à Katharina, qui ne manquerait pas de tirer profit de ce bref épisode, lui était désagréable. Peut-être parce qu'il était lui-même renvoyé à l'étrange impression de n'être qu'un pion sur un échiquier bien plus large, dominé par la silhouette aux cheveux d'argent. Si on devait reconnaître quelque chose à ces Nordiens agités, c'était bien d'avoir fait naître une solidarité entre lui et cette étrangère hautaine. Les deux sbires arrivèrent à leur hauteur. « La reine vous attend, princesse de Lavis. » Il hasarda un regard vers sa complice, égale à elle-même dans son air inflexible. Ne témoignaient de leur arrivée turbulente que la coloration de ses joues et ses pupilles qui brillaient. Aaron s'écarta pour la laisser passer, puis lui emboîta le pas, comme une ombre.


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Ven 4 Juin - 21:25


confrontation

aaron buschy et serena de lavis





Il ne s'est rien passé, avait-il dit. Aussi surprenant était-ce qu'il lui tende ainsi la main alors que rien ne l'y forçait, elle acquiesça d'un signe de tête. Et de ces mots émanèrent une promesse consensuelle entre les deux. Il ne s'était rien passé. Elle ne s'était pas dépouillée de toute contenance, là, à la vue de tous, laissant s'échapper des bribes de faiblesse au travers de son enveloppe faite de droit divin. Et lui ne l'avait pas aidé à se ressaisir tout en lui évitant la honte supplémentaire de rendre sa scène publique en congédiant les autres soldats, juste lui temps qu'elle ne reprenne forme. Qu'elle recolle ces morceaux d'elle qui s'éparpillaient, qu'elle ne retrouve une certaine contenance. Pourtant il lui semblait que tout continuait à s'écouler, à s'échapper, mais à présent seulement dans sa tête. Elle n'arrêtait pas de se revoir là, dans la rue, les mains de cet homme autour de son cou, son regard rempli de haine, et puis de voir son corps par terre, inanimé, mort. Elle en avait déjà vu, des morts. Elle en avait déjà vécu, des violences. Mais jamais comme ça. Elle rouvrit sa paume où était encore sa bague. Elle ne se souvenait plus de l'avoir reprise, l'avait-elle récupéré par terre ou sur son agresseur ? Elle se retrouva soudainement mal à l'aise à la vue du bijou qu'elle avait tant aimé auparavant, et se demanda si peut être l'homme serait encore en vie si elle l'avait juste laissé la dérober et s'enfuir. Ces interrogations n'eurent le temps de trouver de réponse car son protecteur s'écarta de quelques pas, reprenant les convenances qu'elle avait tant jugé important de souligner un peu plus tôt, alors que les deux soldats revenaient.   

Elle aurait voulu s'excuser d'avoir été si dure avec lui, ou au moins de simplement le remercier, mais elle n'osa pas le faire devant d'autres et se promit de le faire plus tard. Il ne s'était rien passé avaient-ils convenus, et si tous devait être au courant maintenant qu'elle avait été agressée, ce qui avait suivi n'était plus, car ils avaient décrétés que ce qui avait suivi n'existait plus. C'était aussi simple que cela, et pourtant pas aussi simple, car on l'avait vu, commencer à se dissoudre, ce on étant les deux soldats qui étaient revenus. « Savoir dire un titre correctement vous écorcherez donc la langue ? » asséna-t-elle sèchement à leur escorte. Basse manière de rééquilibrer un peu la balance, mais sa manière à elle. Voilà, elle avait reprit consistance, elle était à nouveau cet être particulier, dont le statut princier ôtait tout attribut de normalité, et qu'on avait pourtant lâchement marchandé pour une alliance qui ne tiendrait jamais. Elle adressa un sourire vers sa première escorte, se rappelant que sa pique devait lui rappeler ce qu'ils s'étaient dis plus tôt, alors qu'il venait pour l'accompagner ici. Et puis elle suivit les deux soldats, entendant dans son dos les pas rapprochés d'Aaron qui la suivait.

Elle l'attendait, la reine. C'est ce qu'ils avaient dit. Elle aurait voulu qu'ils disent autre chose, qu'ils l'emmenaient vers ses appartements, qu'ils lui faisaient voir les jardins ou toute autre chose que celle là. Elle ne voulait déjà pas la voir déjà ce matin, et encore moins maintenant. Alors qu'ils marchaient, elle faisait nerveusement tourner sa bague autour de son doigt, sentant soudainement comme un étau autour de son doigt alors qu'elle ce bijou ne l'avait pas quitté depuis des années sans qu'elle ne ressente quoi que ce soit. Elle n'arrêta que lorsqu'elle se retrouva là, devant elle, la reine. Ce fut à contrecœur qu'elle s'inclina face à sa présence. Elle n'avait pas d'autres choix que se tenir là, droite et souriante, alors qu'elle bouillonnait de l'intérieur. « Votre Majesté » Ça sonnait faux en bouche, avec un arrière-goût amer. « Ma chère Sera  » A ces mots, elle se raidit, et sentait déjà les deux autres soldats s'amusaient de ce retour de bâton qu'elle se reprenait après les avoir reprit sur les titres. Et personne n'avait le droit de l'appeler Sera, à part ses frères et quelques unes de ses sœurs. Mais elle n'en dit rien, se contenant de sourire poliment. « Comment allez-vous, il m'a été rapporté que votre trajet jusque ici a été un peu mouvementé. J'espère que cela ne vous a en rien affecté évidemment. »

Là encore, ça sonnait faux, presque trop pour être vrai et elle alla jusqu'à se demander si tout cela n'était pas juste une vaste plaisanterie de mauvais goût, après tout ils n'avaient jamais été connus pour être un peuple très fin. Elle avait un entraperçu de ses années à venir ici, constamment rabaissée et humiliée, mais jamais publiquement, toujours derrière un masque mal mis de politesse. Elle se sentait vouloir s'adonner à une certaine rage, à crier et insultait, après tout n'étaient-ce pas les seules choses qu'ils comprenaient ? Et puis elle se rappela les mots de celui qui se trouvait juste derrière elle, et qui n'avait été autre chose que gentil et poli avec elle malgré qu'il soit l'un des leurs. Il ne s'était rien passé. Il ne devrait donc rien se passer. Les faits exposés et connus seraient les seuls qu'elle évoquerait, sans laisser la moindre bribe d'elle s'échapper à nouveau. « Votre Majesté  » Ces deux mots lui écorchèrent la langue mais ils étaient nécessaires. « Si par là vous voulez dire que j'ai pu voir de plus près ce peuple qui est à présent le vôtre je consens que cela est vrai, et je peux ainsi vous dire que ce peuple a bien des revendications qu'il vous serait bon d'entendre, mais cela est sûrement complexe de là où vous êtes. Elle s'arrêta un instant, fixant l'anneau à son doigt. Il ne s'était rien passé. « Nombreux sont ceux qui souffrent dans cette cité en ce moment même » Elle comprise. Elle d'abord. Aussi égoïste était-ce de le penser, elle était fermement emprise de ce sentiment. « Je tiens donc à vous remercier d'avoir su me procurer une aussi complète escorte jusque ici, et ainsi d'assurer la bonne portance de ma personne et donc de la pérennité de l'alliance entre nos deux nations. »

Faux, encore. Elle le savait, ils le savaient tous. Aussi doué était Aaron, personne de censé n'aurait jugé bon de n'accorder qu'une seule personne pour constituer une escorte dans une cité aussi remuée par le chaos. Elle avait sûrement un plan, la jeune impératrice, mais lequel, c'était ce qu'elle cherchait à savoir. Mauvaise reine. Impératrice de pacotille. L'adolescente face à elle semblait jubiler intérieurement de la situation, ce qui l'énervait encore plus. Elle lança un regard en arrière, allait-il lui aussi la railler à présent, maintenant qu'il était parmi les siens, et les rejoindre dans leurs tentatives de l'isoler encore plus. « Maintenant si vous me le permettez, j'aimerais pouvoir prendre possession de mes nouveaux appartements » Elle s'arrêta ainsi, sur une proposition de mettre fin à cet échange sans intérêt, pressée de pouvoir s'éloigner de ces gens, de pouvoir aller s'effondrer dans l'ombre.






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