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Beautiful doom ft. Aiden & Teresa

Alessandra de Marbrand
Alessandra de Marbrand

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Sam 20 Mai - 23:24





AIDEN & TERESA
— beautiful doom —

Deux êtres que tout oppose, réunis sous la même bannière des exclus. Reniés pour ce qu'ils sont, craints pour ce qu'ils représentent, ils sont devenus des parias. Mais cette sentence n'a pas un goût si amer sachant ce qui les attendait... La sentence de vivre est tombée, leurs crimes à la vue de tous ils doivent vivre avec les conséquences de leurs actes. Un lourd changement aux allures de salut quand elle se met côte à côte avec une mort certaine. Maudits par leurs propres actes, quelle belle punition.

Deux êtres que tout oppose, réunis par le plus grand des hasards. De retour à Vivendale, Aiden doit commencer une nouvelle vie, celle de l'après-procès, une vie que Teresa a déjà commencé à apprendre à vivre. Ces deux êtres que tout opposait semble avoir plus en commun qu'on ne le pense.

" L'enfer c'est les autres "
                                       - Sartre

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Alessandra de Marbrand
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Mar 23 Mai - 15:14





TERESA LABONAIRE
— beautiful doom —

Enfant, déjà, elle s'était éprise de la mort. Gamine elle assistait avec ferveur aux procès qui se déroulaient régulièrement sur la grande place. Plus des exécutions jouées que de véritables procès. C'étaient un peu leur spectacle d'expiation, à eux qui d'habitude étaient les victimes et non les spectateurs. La mise en scène l'avait toujours fasciné, l'impassibilité des bourreaux, la dureté des gardes, les tentatives désespérées de l'accusé pour faire valoir son innocence, et ce moment, cet instant de flottement une fois que la lame eut tranché la nuque du coupable, pas un bruit, pas un geste, le temps d'un instant le temps semblait littéralement s'arrêter. Plus tard ce court instant perdit son sens, lorsqu'elle eut embrassé sa destinée, à chacune de ses nouvelles victimes ce moment s'estompa un peu plus jusqu'à complètement disparaître. La mort, dans un sens, perdit alors de sa poésie pour devenir une habitude. La routine de l'assassine. Cette routine qui se retourna contre elle lorsqu'elle dû s'asseoir sur le banc des accusés, devenant alors actrice de son spectacle favoris. La mort, qui lui était si familière dans son travail, lui accordait à présent une visite personnelle. Elles y étaient, finalement face à face, et pourtant rien ne paraissait familier. Là où elle aurait dû simplement suivre les traces de ses victimes pour la guider, elle ne vit qu'un chemin immaculé, une page blanche sans point final, car ce n'était pas la mort qui l'attendait, bien au contraire. Telle la lame du bourreau sur la nuque de sa victime la sentence était tombée - rapide, brutale - la vie.

Était-ce une punition ou bien une seconde chance ? Elle préférait que ce soit une punition, elle n'était pas très douée avec les secondes chances, elle n'en avait jamais eu, une punition au contraire... Elle avait toujours su transformer ses sentences en quelque chose de bénéfique pour elle. Quand on l'avait chassé de chez elle, laissé à mourir dehors, elle avait survécu, quand on l'avait arrêté, prête à l'emmener au bûcher, elle avait survécu, quand on l'avait arrêté pendant la bataille, quand tous avait cru qu'elle y laisserait sa vie, elle avait survécu. Survivre, la devise de sa vie. Elle était Teresa Labonaire, c'était une survivante.

Observant le liquide brun au fond de son verre, elle s'interrogeait sur sa journée du lendemain. Qu'allait-elle faire ? Toujours à la recherche du Cercle elle se contentait d'accepter un ou deux contrats par ci par là le temps de les retrouver. Mais même cela l'ennuyait, pour l'instant les clients se faisaient rares, effrayés par l'exposition publique engendrée par son procès. Ils avaient peur qu'elle soit surveillé, qu'ils aient des ennuis en allant vers elle. Trouillards, pensa-t-elle, quelques autres, plus téméraires, virent en cette mise en lumière un petit quelque chose qui l'a rendait plus intéressante que les autres, cependant ces gens là se comptaient sur les doigts d'une main. Mais plus que le manque de clients, ce qui la dérangeait était qu'à présent tout le monde connaissait sa vraie nature, et ce tous incluait ses futures victimes. Reposant son verre avec dédain la jeune femme poussa un soupire. L'avoir laissé en vie n'était pas sa punition, son châtiment était de vivre sans le pouvoir réellement, elle n'était pas libre. Coincée dans une prison sans murs, une prison d'esprit, elle ne pouvait pas être celle qu'elle était, celle qu'elle voulait être. Margaery avait peut être pensé être clémente en elle en lui accordant la vie sauve mais cette vie là, où était la clémence, c'était une sentence déguisée en bonté.

Lassée de ruminer elle vida son verre d'un trait. Elle balaya la taverne du regard, toujours les mêmes personnes, buvant toujours la même chose, ennuyante monotonie devenue son quotidien. C'est alors que son regard se posa sur une personne assise seule, loin d'être un habitué, en fait c'était la première fois qu'elle le voyait ici. Pourtant elle le connaissait très bien, Aiden Ruthendell, l'inventeur de Vivendale. On eut entendu dire par les gardes que son procès fut phénoménal, pourtant, et malgré les attentes de tous, le génie fut libéré de sa cellule. Teresa n'avait alors jamais cru le revoir, envoyé au loin pour accomplir une mission, elle, comme tous les autres, crurent qu'il serait tué en chemin, que cette mission n'était qu'un alibi pour se débarrasser de lui, il suffirait alors de dire qu'il était mort lors du trajet, les maladies étaient si fréquentes sur les bateaux, et qui sait s'il n'aurait pas non plus pu attraper cette fameuse épidémie qui avait touché ceux qui étaient restés au pays. Et pourtant, malgré toutes les rumeurs et autres dires, il était rentré vivant. La jeune femme esquissa un sourire, sacré Aiden. Se levant de son siège, elle approcha du jeune homme en le jaugeant, il paraissait étrangement las, fatigué, peut être rentrait-il à peine de son voyage. « Mais ne serait-ce pas l'homme le plus détesté de Vivendale ? » commença-t-elle d'un ton provocateur. Soudainement cette triste soirée devenait très intéressante

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Dezbaa
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Mar 23 Mai - 22:08

Aiden Ruthendell
And it all falls down.

La reine est morte ! Un homme, vêtu d'un rouge brodé d'or, avait annoncé cela. Il n'avait pas de parchemin à la main, pas d'épée au côté ; il dégageait simplement cette prestance particulière de ceux qui savent parler. Aiden assistait à la scène, un peu à l'écart de la foule. Il observait les visages : la tristesse et la joie alternaient dans un contraste saisissant. Lui, il souriait sombrement. Morte. Parfait ! Elle ne méritait que ça - et au fond de lui, il espérait un peu qu'elle avait souffert, que son agonie n'avait pas été douce, et que la mort avait agi comme une délivrance terrifiante. C'était un juste retour des choses et, enfin, après tout ce temps, une bonne nouvelle. Une bonne nouvelle parce que le chapitre Katharina se fermait, et que les Vivendalais allaient pouvoir goûter à la liberté ; une terrible nouvelle parce que la souveraine n'avait pas de descendance. Le chaos suivrait les pas de la faucheuse et, une fois de plus, engloutirait la cité dans sa gueule béante, qui à rien n'était soumise, sinon aux tourments éternels. Et lui, lui, l'Inventeur, le génie, finalement, aurait le choix ! Entre la place qui lui était due et celle qu'il souhaitait : adieu celle qu'on lui imposait ! Il pourrait redevenir cet homme qu'on craignait et qu'on admirait, cet homme au sujet duquel les murmures proliféraient, cet homme qui n'avait d'autres amours que celles qu'il entretenait pour l'art et la science ; ou bien il pourrait partir, s'enfuir, détruire celui que chacun connaissait, ne laisser derrière lui qu'un souvenir, qui au fil des âges s'estomperait. Quel doux rêve !

Là était tout le problème. Ce n'était qu'un rêve. Aiden s'était réveillé avec un goût pâteux en bouche, celui d'une amertume doucereuse. Il n'y avait pas homme qui aimât les songes plus que lui. Ils étaient des sources d'inspiration et d'idée : s'il y pensait, il griffonnait les restes sibyllins de sa nuit sur un morceau de papier, que plus tard il retrouvait entre deux liasses ou sous un encrier. Pourtant, celui-ci l'agaçait. Il lui avait apporté les réalisations d'un espoir qu'il nourrissait depuis longtemps désormais, pour les lui arracher dès les premiers rayons du soleil, et le replonger dans un quotidien exécrable.
Depuis qu'il était revenu de son exil temporaire, tout lui paraissait détestable. Il haïssait chaque parcelle de Vivendale avec une ardeur qu'il ne se connaissait plus. La lassitude s'était éclipsée, et à la fatigue s'était couplée une ire renversante. C'était cela qu'il voulait : tout renverser ! Pas seulement cette pauvre chaise qui s'était malencontreusement trouvée sur son chemin, alors qu'il subissait un accès de colère. Mais tout ! L'ordre.

Le lion était retourné dans sa cage.

Plutôt mourir !

Mais personne n'entendait ses rugissements de désespoir. Le lion était seul, voué à demeurer seul, toujours seul. Peu importait combien d'âmes le frôlaient ! Elles ne faisaient qu'accroître ce drôle de sentiment de solitude. Ce n'était pas, en soi, un état qui le gênait. Il en était gêné parce qu'en dépit de sa mise à l'écart, les voix grésillaient à ses oreilles comme autant de petits insectes dérangeants. Les mouches tournoyaient, et il imaginait bien qu'elles seraient ravies de poser leurs pattes répugnantes sur sa carcasse entamée. Qui ne voulait pas un morceau de cet assassin ? Qui n'avait pas de grief contre lui ? N'était-ce pas ce sur quoi tout reposait le procès qu'on lui avait intenté ? Tous ces sots qui se prenaient pour des rois ! Il les aurait bien dévorés ; le monde en aurait été soulagé. Mais force était de reconnaître que le lion faiblissait - du moins qu'on l'avait trop acculé. Ses marges de manœuvre existaient, mais elles demeuraient moindres.

Alors, il méditait son malheur. Tantôt dans les jardins de la Tour, tantôt dans les rues animées, ce soir-là dans un bar faiblement éclairé. Il était assis dans un coin, les pieds sur la table, une chope à la main, le visage à découvert - comme s'il lançait à tous ces gens une ultime provocation, ouvertement. Comment aurait-ce pu ne pas en être une ? Bien idiot celui qui croirait cela. Du moins, cette pensée aurait été le signe qu'il connaissait mal ce génie, qui prenait un malin plaisir à défier quiconque posait les yeux sur lui. Nul n'était trop haut ou trop bas pour cela : c'était pour tous les hommes ce traitement enflammé.
Il méditait son malheur, les yeux perdus dans le vague, comme un écran noir sur ses sombres pensées. Il cherchait des échappatoires et des solutions, mais les barreaux de la cage étaient serrés. Il ne croyait pas qu'il était impossible de se faufiler entre ceux-ci. Il le pouvait sûrement ; seulement, il y perdrait quelque chose. C'était certain : le seul doute qui planait restait celui qui auréolait ce qu'il devrait abandonner de sa personne. Bonne question, par ailleurs, et- « Mais ne serait-ce pas l'homme le plus détesté de Vivendale ? » Il releva la tête vers la femme qui l'avait rejoint - il ne l'avait pas vue s'approcher. Il la reconnut immédiatement. Teresa Labonaire. « Et n'est-ce pas là mon homologue féminin ? » répliqua-t-il sur le même ton, avec son habituel sourire en coin. Il ne pouvait pas prétendre ne pas être surpris de la revoir. Dès le départ, il avait songé qu'elle était de ses rencontres éphémères, qui ne donnent suite à rien d'autres que quelques souvenirs fugaces. Pourtant, depuis la fin des procès, depuis qu'il savait que, comme lui, on lui avait laissé la vie, il s'était questionné à son sujet. Difficile de s'en cacher : cette jeune femme l'intriguait. Sarcastique, il reprit : « Et pourtant, il semblerait que les Dieux nous aient presque graciés. Ils sont si miséricordieux. » Il retira ses jambes de la table et y posa sa choppe. « La vie est drôlement faite. » Et comment ! Il observa la paria, cette femme qui avait été sa voisine de cellule, avec qui il s'était disputé, avec qui il avait ri, avec qui il avait fait passer le temps qui le séparait de ce qu'il croyait être la mort.
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Mar 13 Juin - 12:54


TERESA LABONAIRE
— the lion and the wolf —

L'ennui la berçait lentement, pire que l'attente en elle même, il la dévorait lentement, petit à petit, de l'intérieur. Laissant son esprit voguer sur la rivière incertaine de son avenir, explorant avec prudence les différentes possibilités qui s'offriraient bientôt à elle. C'était ça le pire. Les possibilités, car elle n'en avait pas vraiment, les circonstances lui en imposaient certaines, mais ce n'était pas celles qu'elle aurait voulu. Elle aurait voulu vivre, reprendre sa vie là où elle l'avait laissé, mais c'était impossible. Elle n'avait que trois options : fuir, mourir ou vivre avec. La première semblait la plus idéale, mais elle était aussi la plus compliquée. La seconde, plus simple, trop simple même, et clairement loin de ses intentions. Et enfin la dernière, vivre avec, la plus complexe et la moins alléchante, semblait pourtant être la seule à sa portée. A moins que... Son regard se posa sur un jeune homme, une vingtaine bien avancée, peut être même la trentaine, qui se tenait face à elle. Jusque là elle n'avait même pas remarqué sa présence. Depuis combien de temps était-il là, des minutes, des heures ? « Dis moi mon grand » Elle fit un pas en avant, ses lèvres s'étirèrent doucement dans un sourire en coin. « Ça te dirait de faire passer un peu le temps, toi et moi. » Son doigt se posa sur le torse du jeune homme qui, gêné, ne semblait pas pourtant désintéressé par son offre, jusqu'à que... un rire retentit derrière eux, moqueur, le soldat déguerpit aussitôt, et les doigts de la jeune femme se resserrèrent sur les barreaux de sa cellule. « Bien joué, petit inventeur » railla-t-elle. « Tu viens juste de faire fuir la seule distraction de ce trou à rats, tu comptes me faire mourir d'ennui avant mon procès ? » Pour seule réponse, le garçon esquissa un sourire en coin.

***

« Et n'est-ce pas là mon homologue féminin ? » répliqua-t-il avec un petit sourire. La jeune femme prit place sur l'une des chaises voisines. « La femme la plus détesté de Vivendale... » Elle goûtait ses mots, ils avaient quelque chose de satisfaisants, ils inspiraient la crainte. « J'aime bien » conclut-elle en haussant les épaules. Pourtant, lui comme elle savait que ces titres ne valaient rien, de loin ces mots inspiraient la crainte, mais en réalité, ils inspiraient plutôt le dégoût, et la pitié, ils étaient des parias, rien de plus, rien de moins. « Bien qu'il se peut qu'une certaine gamine m'est détrônée sur ce point. » De ses lèvres, elle forma grossièrement le mot Katharina, sans aucun son, la jeune femme conclut sa tirade muette par un rire tandis qu'elle s'enfonçait dans son siège. « Et pourtant, il semblerait que les Dieux nous aient presque graciés. Ils sont si miséricordieux. » Le jeune homme reposa ses pieds jadis sur la table au sol, et posa sa choppe que la jeune femme attrapa aussitôt, observant son contenu avec dédain. « N'est-ce pas le propre des dieux ? D'incarner toutes ces vertus à la con dont on ne fera jamais preuve, des hommes imaginaires aux qualités imaginaires... » fit-elle dans un geste évasif de la main. La jeune femme avait depuis longtemps perdu foi en leurs dieux, elle y avait cru un temps, quand elle était enfant, mais à toutes ses prières, jamais ils ne lui avait répondu, sa foi s'était alors éteinte dans le silence de leur réponse, elle était seule, elle ne pouvait compter que sur elle même. « La vie est drôlement faite. » La jeune femme fronça les sourcils, affligée par cette affirmation pourtant véridique. En effet elle l'était. « Et comment, mais il me semble que la tienne fut plus palpitante que la mienne, je suis sortie d'un trou à rats pour me terrer dans un autre trou à rats. Alors que toi, Aiden, le petit inventeur qui a réussi à garder sa tête tout en défiant l'autorité de la grande Katharina et... » Sa phrase fut interrompue par un rire, son rire, « Grande Katharina, ah, c'est étrange non ? Surtout qu'elle a l'air d'avoir quoi, quinze ans, c'est encore une gamine. » Elle pencha le verre vers son nez, avant de le plisser avec dégoût. « Une gamine qui a réussi à détruire le travail de nos vies d'un claquement de doigts... Tu as raison, la vie est drôlement faite. » conclut-elle avec sérieux cette fois-ci. Peu avant la bataille, ils avaient tout pour eux, Aiden était au service des Trois, les hommes les plus puissants de cette terre, et elle, elle vivait sa vie de sicaire la nuit, esclave le jour, jouissant d'entrer dans l'intimité de ses maîtres pour mieux les trahir l'heure venue. « Tu as besoin de quelque chose de plus fort qu'une malheureuse bière mon ami, notre soirée ne fait que commencer. »

Elle esquissa un sourire. Elle ne l'avouerait pas mais elle était contente de le revoir. Au début elle ne l'appréciait pas, il lui semblait arrogant, elle lui avait sûrement semblé idiote, puis, dans la solitude, ils s'étaient ouverts l'un à l'autre, se chamaillant à longueur de journée, s'épaulant la nuit. Entre cris et rires, ils avaient passés des semaines ensemble, des semaines dans de drôles de circonstances. Il n'était peut être pas un ami, ou un proche, mais leur temps en cellule avaient irrémédiablement tissé un lien entre les deux. Aiden et Teresa, les meurtriers de Vivendale, la pensée et l'action qui se rencontrent.


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Sam 17 Juin - 10:19

Aiden Ruthendell
Here's to the ones who dream. Here's to the mess we make.

S'il n'avait pas eu le loisir de se promener dans le palais de ses souvenirs et réflexions, il serait devenu fou. Il en était certain. L'enfermement n'était pas pour lui ; il était adapté aux gens dociles, ceux-là même que l'on n'avait pas besoin d'emprisonner car ils étaient trop serviles. Ce sont toujours les âmes rebelles, les âmes vagabondes, qu'on essaye de coincer. Celles qui sortent du rang, qu'elles soient les pires ou les meilleures. Aucune importance ; et l'Homme sera toujours ainsi, à vouloir contrôler ce qui sans cesse lui échappe, sans lui laisser l'occasion de montrer son entière valeur. Il n'en veut pas. Elle l'effraie, à tort ou à raison, alors il la tue. Il tue la valeur en la cachant, en la déguisant, il la tue, et Aiden s'en révoltait. Dans sa cellule miteuse, il avait nourri cette rancune. Elle était comme un oiseau de proie, qui lentement avait construit son nid, et qui n'attendait plus que le signal pour s'envoler et s'abattre sur sa victime. Cependant, le lion lui demandait de patienter. Il n'était pas encore temps ; la chasse à la reine n'était pas encore ouverte. Mais bientôt. Bientôt.
Bientôt, les crocs des loups et des lions viendraient ronger sa gorge et déchirer son corps écartelé. Ils étaient désunis, mais l'ennemi commun leur ferait oublier les querelles passées. Il le savait. Il voulait le savoir. Il voulait y croire. Ils la détruiraient, d'un même mouvement, sans s'être coordonnés ; ce serait comme un dernier élan de tous les corps, un dernier élan sublime. Il ne pouvait plus chasser sa haine. Il l'exécrait. Son rêve le lui avait rappelé. A morts les tyrans. Quelque chose en lui s'était éveillé. Il avait toujours craint de prendre lui-même une vie, mais tous ses sens appelaient désormais à s'adonner à et à admirer un macabre carnage. Le sang qui coule, la chair qui s'arrache, les os qui craquent. Le morbide et le sinistre qui valsent ensemble, chacun agrippé à la taille de l'autre, le regard sombre plongé dans celui qui semble refléter un néant ; exquis, adéquat, désiré.

Teresa ferait partie de cette meute vengeresse. Il avait cru le deviner dès le premier jour, lorsqu'il avait croisé son regard presque noir, ses iris ardents qui disaient la colère de tout un être. Bête en cage, avait-il pensé. Et il s'en était amusé. Il avait chassé ses distractions, débuté l'isolement, agacé ses sens. Il l'avait testée, elle avait résisté ; alors, il avait eu la confirmation qu'elle n'était pas qu'une bête de somme, qui suit son destin sans se poser de questions, l'air hagard et l'esprit vague. Non ; elle était comme lui. Une âme libre. Même tragédie.
Ils s'étaient rapprochés avec méfiance ; mais que pouvait-on attendre d'autre de la part de deux prédateurs ? Ils s'étaient parlés, puis ils avaient murmuré. Les secrets n'avaient pas été révélés, mais un pan du voile s'était levé. On avait laissé s'évader les rêves et les espoirs, on les avait mêlés, et ils étaient revenus plus forts et plus déterminés. Chaque jour, la même chorégraphie. Rythme imperturbable, rythme auquel ils s'accrochaient pour ne pas se briser ; pour seulement ployer, presque trop docilement pour que leurs esprits ne se révulsassent pas. Mais ils s'étaient accrochés. Fermement. Et ils avaient été libérés.

« Les gamins ne détrônent pas les plus expérimentés. On leur laisse croire cela simplement pour satisfaire leurs caprices et ne plus en entendre parler. Tous les tyrans aiment croire qu'ils sont haïs. La haine, c'est la puissance. La seule qui puisse chasser l'amour, en fait. » Il haussa nonchalamment les épaules. Plus le temps passait, plus il acquérait en savoir dans ce domaine. Pour une fois, il ne se réjouissait pas d'apprendre quelque chose. Au contraire, il s'en désolait. Il la perdait, et il s'en doutait. Juliet... L'alcool ramenait à ses narines ses effluves et il regrettait, un peu, malgré tout. Sans pouvoir s'empêcher de penser qu'elle était fautive, et que les Trois l'étaient, et Katharina aussi. Elle avait donné un coup de pied dans les braises, et le feu s'était réveillé. « Par ailleurs, plus d'une vie est nécessaire pour oublier les fantômes qui nous ont tant tourmentés, et contre lesquels on a tant luttés. Tu resteras dans les mémoires, Teresa la sicaire. » Un sourire mutin vint décorer ses lèvres. Ils avaient pris soin de marquer Vivendale au fer rouge. Leurs noms étaient gravés sur ses murs. Ils étaient devenus des chimères de Dieux cruels, des fantasmes qu'on exècre. « N'est-ce pas le propre des dieux ? D'incarner toutes ces vertus à la con dont on ne fera jamais preuve, des hommes imaginaires aux qualités imaginaires... » Il eut un rire rauque, qui s'éteignit rapidement dans sa gorge. « J'aime bien cette vision des choses. » Tous des fantasmes, un monde onirique... Des Dieux pantins d'Hommes qui ne voulaient pas croire à leur désillusion.
« Ce n'est pas ce que tu as fait toute ta vie ? Te terrer dans un trou à rats. » demanda-t-il, un sourire provocateur sur le coin de la bouche, mais une lueur presque désolée collée à la rétine. C'était le sort qu'on réservait à tous les gens de son espèce. Teresa était sans doute une femme terrible, une tueuse, mais il ne pouvait s'empêcher d'éprouver de la sympathie pour elle. Peut-être s'y identifiait-il un peu, un peu trop. Mais n'était-il pas lui aussi un tueur de Vivendale ? C'étaient des mots qu'on avait susurrés à son procès. « Et Katharina... Oui, Katharina a encore en elle la tyrannie caractéristique des enfants. Dix-sept ans, Teresa. Dix-sept ans et déjà reine de presque tout un continent. » Il passa ses mains sur son visage d'un air fatigué. « Je serais surpris qu'elle ne devienne pas l'un des monstres qu'elle chasse. J'ai beaucoup voyagé, et je n'en ai vu aucun qui ne s'agenouille pas devant le pouvoir. Elle pliera aussi. C'est triste à dire, mais elle pliera. » Il fallait qu'elle pliât. Il le fallait, s'ils voulaient récupérer Vivendale plus facilement. Récupérer Vivendale... Les mots sonnaient drôlement. Il n'était qu'un étranger, ici, depuis le début, il se sentait comme un étranger. En fait, il n'avait pas tant envie de récupérer Vivendale que de voir celle qui l'avait humilié à genoux, la nuque offerte à la lame du bourreau. Et à côté de cela... à côté de cela, il s'imaginait qu'il pouvait enfin partir. Une étincelle palpitante au creux de l'œil, il se tourna vers Teresa et affirma : « Elle n'a rien détruit. On peut lui faire croire qu'elle nous a détruits, mais ça ne doit pas être vrai. Tout le travail de nos vies est en nous, après tout. Il nous suffit de creuser. » Il se souvenait de son antre saccagée, des papiers éparpillés, des encriers renversés, des tableaux déchirés. Cela l'avait mis dans une rage folle, jusqu'à ce qu'il se raisonnât : rien n'était perdu. Il y avait tout en lui. Il retrouverait tout, recommencerait tout. Il avait la vie devant lui. Et sinon, tant pis ! Ce n'était pas lui que l'on privait de ses idées et inventions. « Tu as besoin de quelque chose de plus fort qu'une malheureuse bière mon ami, notre soirée ne fait que commencer. » - « Ah oui ? Je te laisse choisir la boisson, alors. » Il sourit, encore, avant de mieux se caler dans sa chaise. « Et quel est le programme de la soirée ? Ressusciter le passé ? Je suis curieux. » Il la regarda, du coin de l'œil, dans l'attente d'une réponse, et leva la main pour faire signe au tavernier qu'ils allaient commander.


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Mar 18 Juil - 23:10





TERESA LABONAIRE
— hear us roar —

De sang et d'or étaient fait ses jours, pour chaque goutte vermeil d'un visage inconnu, une pièce d'or. Macabre routine devenue un rassurant quotidien. Monstre ! disait-on d'elle, elle l'avait toujours su, qu'on pensait ça d'elle, mais elle ne l'avait jamais entendu en face jusqu'à son procès. Là, enchaînée comme un de ses loups dans les fosses, ils avaient alors osé dire ce qu'il pensait. Meurtrière ! Eux qui n'avaient jamais osé dire de telles choses avant ce jour, de peur peut être qu'elle ne retourne sa furie contre eux. Assassine ! C'était trop facile, de la blâmer pour ça, c'étaient eux les assassins, eux qui l'avaient payé pour tuer, ils avaient juste été trop lâche pour accomplir la besogne eux même. A tous ses hommes sans courage, elle avait rendu service, et pour ses services, en plus de quelques pièces d'or jetées au visage avec dédain, elle récoltait la peur et la haine de tous. Animal ! Bien qu'elle fut toutes les sales choses qu'on avait dit sur elle, un monstre sans coeur, une misérable assassine à la solde, une épée louée au meurtre et à la corruption, c'était la dernière qui l'avait le plus satisfaite, " Animal ". Car quiconque avait profané cette insulte, le visage noyé dans une foule d'anonymat, avait eu raison. Elle n'était pas comme le loup jeté dans une fosse à combat pour divertir les foules.

Elle était le loup.

Un loup en cage, libérée d'une fosse pour être jetée dans une autre. Elle était donnée en spectacle. Regardez là, l'assassine, la vile prédatrice, regardez là, exposée au grand jour, regardez là, elle ne pourra plus être ce qu'elle est comme ça, et c'est là la plus grande tragédie, ne pas laisser la bête se nourrir, car petit à petit, elle allait dépérir sous les yeux satisfaits de ces hommes lâches qui avaient cru pouvoir la contrôler. On ne dompte pas un loup, jamais.

Elle en avait vu un jour, un loup, dans une fosse, quand elle était encore une gamine. Son frère avait récolté quatre pièce ce jour là, en aidant la fille-aux-yeux-vairons à porter ces seaux d'eau jusqu'à chez elle, l'enfant s'étonnait toujours qu'elle n'y arrive pas d'elle même, on disait que ces yeux n'étaient pas vairons, qu'un jour ils furent tout les deux verts, mais que lors d'une bagarre, elle était ressortit un peu éborgnée, elle n'avait perdu ni vue ni sang à cet oeil, mais à jamais sa pupille s'était figée en une large aura qui semblait rendre son oeil brun, voir noir. Les enfants avaient peur d'elle, on racontait pleins de choses à propos de ce jour, mais pas Logan et Teresa, ils savaient qu'elle était gentille, elle était souvent venu chez eux, quand leur père était absent, pour aider leur mère à s'occuper de la maison. L'enfant soupçonnait qu'elle puisse en fait porter tous ces seaux, elle n'était pas très maigrichonne, mais qu'elle demandait de l'aide aux enfants Labonaire pour leur offrir ces quelques pièces. La fosse coûtait deux pièces, il en avait quatre, deux pour lui, deux pour sa jeune soeur. C'était la première fois qu'elle allait à la fosse. C'était un cercle assez large dont les murs de bois s'élevaient assez haut pour qu'aucune bête ne puisse sauter ou grimper jusqu'aux estrades, c'étaient de simples planches où les spectateurs se tenaient, debouts, s'entassant derrière la rambarde aussi sommaire que fragile, à croire qu'ils avaient choisi les plus fines branches pour les faire. Les deux enfants s'étaient collées juste derrière les rambardes, profitant de leur petite taille pour se faufiler entre les jambes des grandes personnes. Ils étaient ainsi au plus près du spectacle, il leur suffisait de baisser le nez pour voir l'intégralité de la fosse. C'est alors qu'ils furent entrer les bêtes, un loup et un lion. Son frère lui avait dit qu'il était pour le loup, que c'était un animal du Nord, pas comme le lion, on en trouvait pas dans cette région. Teresa, elle, ne savait pas, c'était la première fois qu'elle voyait l'un comme l'autre, et les deux la stupéfaire. Elle était fascinée par la majesté de ces deux prédateurs, les crocs acérés, les muscles gonflés sous leur fourrure. Le loup était plus petit, mais il paraissait aussi plus cruel, peut être était-ce ces babines retroussées dévoilant ses crocs ou bien simplement la couleur de sa fourrure, semblable à une rue du village en hiver, par endroits, la neige était encore blanche, immaculée, à d'autres elle était sale, grise, hostile. Le lion lui, semblait éclipser sa férocité derrière sa beauté. Il semblait fait d'or, et sa crinière, jamais elle n'eut vu de bête avec une telle crinière, plus belle que celle des chevaux. C'est alors que le combat commença, le loup grogna et le lion rugit. Le loup fut rapide et efficace, mais le lion puissant et rusé, pourtant ni l'un ni l'autre ne gagna le combat. Le loup arracha la gorge du lion qui s'en débarrassa pour l'achever mais, à peine sa besogne achevée, il s'effondrait dans la douleur, laissant la petite fille en pleurs.

La fillette avait appris quelque chose ce jour là. Aussi féroces pouvaient être ces bêtes, ça n'avait plus aucune valeur ici. Une fois jetées dans la fosse, elles devenaient des victimes, les victimes des hommes.

« Les gamins ne détrônent pas les plus expérimentés. On leur laisse croire cela simplement pour satisfaire leurs caprices et ne plus en entendre parler. Tous les tyrans aiment croire qu'ils sont haïs. La haine, c'est la puissance. La seule qui puisse chasser l'amour, en fait. » commença-t-il, haussant les épaules avec nonchalance. L'amour, la haine, ces deux extrêmes auxquels il était si aisé de se soumettre. Elle s'était souvent vanté de n'avoir jamais connu l'amour, mais elle connaissait bien la haine, jusqu'à l'aimer, ce sentiment viscéral de colère qui prenait aux tripes, ce sentiment bestial. « Par ailleurs, plus d'une vie est nécessaire pour oublier les fantômes qui nous ont tant tourmentés, et contre lesquels on a tant luttés. Tu resteras dans les mémoires, Teresa la sicaire. » Le coin de ses lèvres se souleva dans un sourire discret. Bien qu'elle n'eut jamais fait ça pour la gloire, elle ne s'était jamais dérangée à l'idée d'être l'un de ces personnages construits à coup de rumeurs et de mythe, jusqu'à devenir une légende. « Teresa l'assassine sans foi ni loi » Elle ne serait pas admiré pour son courage ni applaudit pour sa contribution à une quelconque cause, mais on se souviendrait d'elle et, dans ce monde où l'on ne se souvient des morts que par des chansons et des légendes, c'était déjà énorme. Peut être écrirait-on une chanson sur elle. On lui donnerait un titre tape à l'oeil sur ses exploits, la femme qui avait tué son fiancé, la fille qui avait tué ses parents, le loup qui aurait bien mangé tout Vivendale, avec l'aide du lion. « Aiden l'inventeur du chaos » Lui aussi serait sûrement chanté pour ses exploits, l'étranger haï pour avoir voulu sauver une ville qui n'était pas sienne, le lion en cage, entravé par les Trois, enchaîné par Katharina. « De belles chansons nous ferons » Au même titre que les grands hommes comme Arnor ou Parsel, ils seraient chanté à travers les âges, mais pas pour les mêmes raisons. Les chansons à leur éloge seraient de dramatiques mélodies teintées de terreur, soulignant leurs tares et insistant sur leurs défaites, une mise en garde, à quiconque voudrait devenir comme eux. Le loup et le lion, une fois en cage, ne sont que des bête de foire. « Ce n'est pas ce que tu as fait toute ta vie ? Te terrer dans un trou à rats. » attaqua-t-il, un sourire provocateur fièrement plaqué contre ses lèvres. Elle s'enfonça dans sa chaise, la bouche entre-ouverte, « Comme toi, le voyageur qui, de toutes les villes de ce putain de monde, a décidé de prendre racines dans ce foutu merdier. » Ah Vivendale, il fut un temps où cette cité inspirait absolument tout, la ville sainte devenue capitale du Nord, la cité révolutionnaire qui avait été le théâtre des plus grands événements de ce monde, n'était aujourd'hui que l'ombre d'elle même, et pourtant, ni le loup ni le lion n'avait pu se soustraire au charme de l'ombre de l'antique grande cité. Il y avait une attraction particulière pour cette ville, peut être parce que, malgré tout ce qui avait mené à sa déchéance, elle restait la ville où tout était possible, où l'impensable devenait pensable, où l'espoir avait encore un sens. « Et Katharina... Oui, Katharina a encore en elle la tyrannie caractéristique des enfants. Dix-sept ans, Teresa. Dix-sept ans et déjà reine de presque tout un continent. Je serais surpris qu'elle ne devienne pas l'un des monstres qu'elle chasse. J'ai beaucoup voyagé, et je n'en ai vu aucun qui ne s'agenouille pas devant le pouvoir. Elle pliera aussi. C'est triste à dire, mais elle pliera. » Elle espérait qu'elle plierait, elle se doutait qu'Aiden aussi. C'était pas sain, de laisser une fille si jeune tenir cette ville, tenir le Nord, elle plierait, c'est sûr. La jeune femme pensa au reste, comme quoi personne ne résistait à s'agenouillait devant le pouvoir, il pliait, elle pliait, ils pliaient tous. La jeune femme fronça le nez. C'était pas sain, de tellement haïr cette fille. Elle n'avait que dix-sept ans. Presque l'âge qu'elle avait eut, la louve, quand elle avait été cette autre personne, cette Teresa Labonaire, bientôt Stark. Stark. Ce nom, malgré les années, lui inspirait le même dégoût qu'au tout début. Sa mort, ma renaissance, pensa-t-elle avec un sourire. « Elle n'a rien détruit. On peut lui faire croire qu'elle nous a détruits, mais ça ne doit pas être vrai. Tout le travail de nos vies est en nous, après tout. Il nous suffit de creuser. » La jeune femme haussa un sourcil, perplexe. Elle n'y croyait pas. « Vraiment ? » Elle s'avança, ses coudes posées sur la tête. « C'est peut être le cas pour toi, car tu peux à nouveau retranscrire tes idées, redessiner tes plans, reconstruire tes machines ou je ne sais quoi. La pensée ne peut pas être détruite petit inventeur. Une épée peut l'être. » Elle était l'épée. Une partie de l'épée. L'épée du Cercle. « Elle a réussi à le détruire pour moi. » constata-t-elle sèchement. Ils pouvaient aussi bien être mort, ceux du Cercle, comment savoir ? Des mois qu'elle cherchait, ils étaient introuvable. Aucune piste ne menait nulle part. Elle haussa les épaules, comme si ça lui était égal. Mensonge. « Elle l'a détruit, et je vais la reconstruire, ou construire autre chose à côté, pt'être moins bien, pt'être mieux. Mais je ne vais pas mentir et me voiler la face, elle a réussi à détruire. On peut dire ce qu'on veut de cette foutue gamine, mais elle a été efficace. » Elle se souvient du matin de son procès, elle avait cru mourir ce jour là, puis durant le procès, là encore elle avait été persuadée qu'elle allait mourir, et ça l'avait fissuré, par endroit, la belle épée louée de Vivendale. « Ah oui ? Je te laisse choisir la boisson, alors. Et quel est le programme de la soirée ? Ressusciter le passé ? Je suis curieux. » Il s'enfonça dans sa chaise et fit signe au tavernier. « Ressusciter le passé ? Pouah non ! Pour qui me prends-tu camarade, je ne ressasse ce qui est passé. Le passé est aussi merdique que le futur, alors pourquoi s'embêter avec deux fois plus de merde ? » Le tavernier s'approcha, interrompant la jeune femme dans sa tirade. « La même chose que tout à l'heure, cet homme doit goûter à ton mélange spécial. » Elle glissa un regard vers le lion. « Je ne sais pas si c'est un vin fermenté différemment ou s'il le mélange juste avec autre chose mais tu verras, ça va décaper toutes tes idées noires. » La jeune femme s'éclaircit la gorge. « Ce soir, nous célébrons mon ami. A nos têtes qui sont encore bien là sur nos épaules. Et à notre futur, puisse-t-il être aussi glorieux que sera la mort de notre très chère reine. » Elle esquissa un sourire, carnassier. La louve avait beau se terrer dans un trou à rats pour se cacher, elle restait un prédateur.





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Dezbaa
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Jeu 5 Oct - 22:07

Aiden Ruthendell
Taking over this town, they shloud worry that we won't run.

Souvenir. Il avait égaré un souvenir. Il l'admettait si peu qu'il avait réussi à le refouler, loin, aux confins de la mémoire. Il était mort avant d'avoir pu éclore ; il s'était évaporé avec le noyé. Le prédateur devenait victime de son propre leurre. Sous le masque de l'inconscient, il tentait d'assassiner le tueur, de réduire son existence à un vaste néant. Un trou noir dans sa vie d'impie. Les Dieux l'auraient - s'ils existaient - et les Dieux l'écartèleraient - son âme, avant tout le reste. Il ne pouvait plus être homme, puisque la bestialité devait avoir gommé son humanité ; pourtant, il ne s'était jamais senti plus humain que lorsque sa main avait écrasé la lame acérée contre la gorge dénudée. Mais c'était une impression diffuse, jetée dans une contrée égarée, presque oubliée. Ses paumes n'étaient rougies que par le sang que les Trois avaient versé par la force de ses idées. En cela, il ne pouvait tout à fait s'identifier à Teresa. La louve avait écharpé de ses crocs. Lui, il restait un monstre spirituel. Il ne croyait pas avoir déjà prouvé sa terrassante réalité ; il était simplement le maillon d'une immense chaîne de décisions. Teresa, elle, avait le goût du sang. Lui, seulement la fascination.

L'assassine sans foi ni loi et l'inventeur du chaos. Ils seraient les monstres qui dorment sur les lits, les fantômes que l'on croit voir la nuit, et toutes les valeurs que l'on fuit. Ils seraient tirés vers le bas, piétinés, détestés, et pourtant, au sein de cette haine subsisterait une admiration éternelle. Un mince sourire tordit les lèvres du génie. Les Hommes portaient si bien l'empreinte de la contradiction ! Ramassis d'incohérences, songea-t-il avec une amertume certaine. « C'est vrai, j'aurais sûrement mieux fait de m'arrêter ailleurs. » concéda-t-il. « Ou de naître et de venir plus tôt, lorsque cette cité pouvait encore se prétendre modèle de félicité. » Une grimace caustique crispa ses traits. « On est parfois drôlement servis par la vie. » Il n'aurait jamais pensé demeurer si longtemps à Vivendale. Cependant, il n'aurait jamais non plus pensé y trouver l'amour - cet amour-chaîne, cet amour-haine, cet amour-peine. Parfois, il se réjouissait des surprises du destin : plus il mettait celle-ci en perspective, plus il regrettait. Pour lui comme pour Juliet, tout allait mal, et tout se finirait mal. Son optimisme, à ce sujet - au moins -, avait entièrement disparu. Il avait été martelé par le forgeron des désillusions, au même titre que ses espoirs pour la ville nordienne. Katharina ne sauverait rien, pour la simple et bonne raison qu'il ne restait plus rien à sauver. J'ai tenté. Fiel de la pensée.

Katharina ne pourrait apporter que la destruction. Peut-être même n'en serait-elle pas l'instigatrice : Vivendale était vouée à une chute certaine depuis plusieurs années désormais. Le déclin de la cité allait croissant. De plus en plus, elle apparaissait comme un vestige du passé, un modèle archaïque figé dans la pierre. Peut-être même que la victoire témérienne signait la véritable fin de son règne ; et ce n'était plus la ville qui s'éteignait, mais la civilisation qu'elle abritait. Il ne savait quoi en penser : le recul spatio-temporel nécessaire lui manquait. Sans doute aurait-il le temps d'y réfléchir, lorsqu'il serait parti... Néanmoins, la remarque de Teresa le ramena rapidement à leur conversation actuelle. Elle parlait de pensées indestructibles et d'épée brisée. Elle affirmait que Katharina avait su ruiner la totalité du travail de sa vie. Mais elle gardait l'espoir de reconstruire - tant mieux. Il secoua la tête. « Une épée, ça se reforge tout comme je peux réécrire mes idées. C'est le même principe. Ce n'est pas là le cœur de mon propos. Ce que je dis, c'est qu'elle a été incapable de détruire ce que nous sommes, notre héritage, notre passé, notre vécu, les mémoires. On ne détruit pas les mémoires. Les Hommes n'en ont pas encore le pouvoir. Alors peut-être que matériellement tu n'as plus rien, mais le "travail de ta vie", ce n'est pas seulement ça. Tu vois ? Les gens te connaissent, ils savent que tu es vivante. Les ardeurs se sont calmées, parce qu'il faut tâter le terrain, repérer les failles... » Son regard dériva vers l'une des petites fenêtres de bois. « Mais je te parie que d'ici quelques temps, tes employeurs pulluleront à nouveau. Les sournois et les lâches, ce n'est pas ce qui manque au monde. » Un sourire narquois tira ses lèvres, alors qu'il fixait quelque chose, au dehors, plus loin. Puis, il reporta son attention sur Teresa. « Évidemment, ça ne sera pas comme avant. On ne peut jamais reproduire à l'identique. Mais il nous suffit de revoir un petit peu nos exigences et nos expectations... » L'Inventeur souffla doucement et serra ses phalanges autour de sa chope. « Alors efficace, peut-être bien - ce n'est pas mon amour débordant pour elle qui me conduira à l'admettre, tu te doutes -, mais pas sur tous les plans. » Et puis, un sourire de connivence.

A défaut de ressasser ce qui était fait, il proposa de ressusciter le passé, mais la sicaire rejeta sa proposition. A ses mots crus, il laissa échapper un rire. Ce n'était pas de la gêne, mais certainement plus de la surprise. Il réalisa alors qu'il avait réellement coupé les ponts avec le peuple. Il s'était laissé enfermer en tout point. Quel petit idiot ! Sûrement, qu'il aurait pu empêcher tout cela. Mais c'était vrai aussi : l'amour abrutissait. Ne jamais l'oublier - trop tard, erreur commise.
Le tavernier s'approcha, et Teresa réclama la boisson de la maison. Le blond arqua un sourcil intrigué. En quelques mots, elle lui indiqua qu'elle ne savait rien de la composition du breuvage, ce à quoi il répondit avec malice : « Tu as de la chance que j'aie l'esprit d'aventure. » Rapidement, le serveur revint avec les deux verres pleins, qu'il disposa devant les prédateurs et leurs sourires carnassiers. Aiden attrapa le sien pour se joindre à la brune et trinquer. « Je croyais que le futur était tout aussi merdique que le passé ? » la taquina-t-il. Puis d'ajouter : « Dans ce cas, tâchons de lui offrir une mort splendide et spectaculaire. » La louve réveillait ses instincts les plus bas : elle chantait à ses oreilles une mélodie qui lui plaisait, par laquelle il s'était hasardeusement laissé guider, et qu'il tentait, depuis et sans entièrement en avoir conscience, d'esquiver.
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Sam 30 Déc - 0:52



TERESA LABONAIRE
— we are the fears of men, we are the masters of vivendale —

Paraître. La perception est pouvoir. Ce que l'on, et ce qu'on semble être. Etre faible mais feindre la force, être fort mais paraître faible, qui gagne ? L'être ou bien le paraître ? Cette question la taraudait depuis longtemps. Etre ou paraître ? Elle jonglait avec ces deux verbes, usant de l'un, puis de l'autre. L'être était utile dans l'instant, lorsque la menace était là. Mais le paraître, le paraître permettait souvent de dissuader la menace potentielle; amenant une certaine protection. Mais l'être donne naissance au paraître au même titre qu'il en est issu. L'être est inconscient, une entité non figée mais pourtant difficile à modifier en l'instant, alors que le paraître, le paraître est maniable, manipulable en l'instant. Laisser paraître quelqu'un que l'on est pas, feindre le pouvoir lorsqu'on est en fait démuni, tel était le secret de sa survie. Elle s'adaptait à son entourage, semblant être qui la personne voulait qu'elle soit, ou bien totalement l'inverse, pourtant, au fond d'elle, elle était toujours la même personne. Louve aux instincts primaires. Paraître, sembler, avoir l'air, l'art du mensonge et des faux semblants pour certains, l'art de survivre pour eux, le lion et la louve. Pour vivre parmi les moutons, les prédateurs doivent feindre de savoir bêler.

Etre et paraître, un art qu'ils avaient appris à manier, eux, les parias de Vivendale. L'un pour survivre emmêlés dans les ficelles de la politique, l'autre pour se faire un nom dans les bas fonds de la cité. L'un au sommet, l'autre tout en bas. Ils étaient partis des opposés pour finalement se retrouver ici, au même endroit, avec cette même réputation que l'on murmurait avec crainte, les deux monstres de Vivendale, les deux maîtres de Vivendale. Ah Vivendale ! Ville de tous les espoirs, ville de tous les déboires. Et il y étaient, aux déboires. Anéantis, le travail de leur vie ! Les poches de l'assassine à la solde étaient vides, et le bureau de l'inventeur avait été pillé pendant son voyage, ses inventions saccagées, ses plans déchirés. Pourtant, le jeune homme n'était pas d'accord. « Ce que je dis, c'est qu'elle a été incapable de détruire ce que nous sommes, notre héritage, notre passé, notre vécu, les mémoires. On ne détruit pas les mémoires. Les Hommes n'en ont pas encore le pouvoir. Alors peut-être que matériellement tu n'as plus rien, mais le "travail de ta vie", ce n'est pas seulement ça. Tu vois ? Les gens te connaissent, ils savent que tu es vivante. Les ardeurs se sont calmées, parce qu'il faut tâter le terrain, repérer les failles... » Les mémoires, ils y étaient entrés. Aiden l'inventeur, Teresa la sicaire, deux bourreaux chacun à leur manière. « Mais je te parie que d'ici quelques temps, tes employeurs pulluleront à nouveau. Les sournois et les lâches, ce n'est pas ce qui manque au monde. » La louve esquissa un sourire devant cette triste constatation qui la ravissait, les sournois et les lâches, c'étaient eux qui remplissaient ses poches. Le propre de son métier reposait sur l'existence de ces couards. « Évidemment, ça ne sera pas comme avant. On ne peut jamais reproduire à l'identique. Mais il nous suffit de revoir un petit peu nos exigences et nos expectations... » Elle fronça le nez, revoir ses exigences n'était pas son fort, et ne le sera sûrement jamais. « Alors efficace, peut-être bien - ce n'est pas mon amour débordant pour elle qui me conduira à l'admettre, tu te doutes -, mais pas sur tous les plans. » La jeune femme posa sa chope et s'enfonça dans sa chaise. « Tu parles toujours autant hein ? » commença-t-elle. Petite pique, taquinerie à un ami. Il aimait étendre sa pensée, quand elle appréciait le concis, sur ça, ils ne s'entendraient sûrement jamais, pourtant, elle commençait à apprécier ses longues tirades. Dans ses longs discours, elle trouvait quelque chose de réconfortant. « Et je pense que tu as raison. » concéda-t-elle. Elle s'empressa de porter la chope à ses lèvres pour boire une gorgée. Le lion ne se manquerait pas de se jeter sur cette concession, il avait eu raison, lui, le génie, avide de vérité, avait eu raison. « Même si... » Elle esquissa un sourire rien qu'à l'idée de voir celui d'Aiden s'effacer brusquement. « ...la fin était un peu simple. " Sur tous les plans ", un peu trop facile pour toi. Tu m'avais habitué à mieux. » commença-t-elle, feignant la déception. « Sur tous les plans, rien ne va dans un sens. Sur tous les plans je ne suis pas le monstre qu'on dépeint, et tu n'es pas aussi intelligent qu'on le prétend. Après tout, il faut être un peu idiot pour s'être fait berné par l'amour d'une femme » L'amour, douce tentation, terrible déception. Elle s'était promit de ne jamais se faire avoir, se contenant de ces passions éphémères. Pourtant, par expérience, elle savait que ce n'était pas si simple. Certaines personnes restent ancrer en nous. Elle fronça le nez lorsque l'image de James s'imposa à elle. Saleté d'ombrageux, pesta-t-elle intérieurement. Elle le détestait, et pourtant, elle savait que s'il n'était plus là, il lui manquerait un peu. Et plus que tout, elle détestait de savoir qu'il avait réussi à s'ancrer en elle ainsi. Juliet Perkins, c'était le nom qu'on lui avait rapporté, le nom de celle qui avait réussi à lier le voyageur dans la cité déchue. « Il parait que ta copine et toi avaient étalés votre linge sale devant toute la ville lors de ton procès. Ah ! Qu'est-ce que j'aurais voulu être là pour voir ça ! » Elle n'avait eu que des bribes, des ragots, mais elle savait déjà que l'inventeur avait délivré une véritable performance lors de son procès. Le sien à elle, beaucoup plus simple, être et paraître, comme toujours, son arme ultime. Paraître et être à la fois, une honnêteté troublante, suffisante pour semer le doute dans les esprits. Il ne le saurait jamais, mais c'était grâce à lui qu'elle avait cette idée, de jouer cartes sur table, mais ça, elle se garderait bien de lui dire.

Finalement, le serveur revint avec les nouvelles chopes. L'inventeur la taquina sur ce qu'elle avait dit, comme quoi le futur était aussi merdique que le passé. « Oh il l'est ! » - « Dans ce cas, tâchons de lui offrir une mort splendide et spectaculaire. » La louve s'esclaffa, secrètement, elle espérait qu'on les ai entendu. Qu'ils savent, qu'ils savent tous, les deux monstres de Vivendale n'étaient pas domptés. Ils ne pourraient jamais les dompter, ils étaient leur propre maîtres, et les maîtres de cette ville.  « Oh elle le sera mon ami, elle le sera. » Elle lança un regard furtif vers le reste de la salle. « Tu as bien fait d'être revenu dans ce foutu merdier maintenant, car c'est pour bientôt. » Elle s'enfonça de nouveau dans sa chaise, la chope entre les mains, un sourire carnassier étirant ses lèvres. « Les choses vont changer, et nous... oh ils vont se mordre les doigts de nous avoir laisser vivre je le sens ! » Monstres de Vivendale, Maîtres de Vivendale.

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Dezbaa
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Lun 1 Jan - 23:54



Aiden Ruthendell
— Bittersweet in your mouth. —

Tu parles toujours autant hein ? Un large sourire amusé tira les lèvres du génie. La parole était à la fois sa meilleure arme et sa plus grande Némésis. Sa meilleure arme, parce qu'il savait manier les mots avec une habileté hors pair, si bien qu'il pouvait aisément toucher cœur comme esprit. Sa plus grande Némésis, parce que le flot ininterrompu de ses paroles sarcastiques ou moqueuses vrillait les tympans et crispait d'agacement. Aiden jouait avec cette ambiguïté qu'il créait ; il s'amusait à valser seul au bord du gouffre. Un jour, il tomberait. Il avait déjà failli le faire plusieurs fois, notamment durant les procès, mais il maniait pirouettes et acrobaties comme un véritable artiste — in extremis, il se raccrochait au bord de la falaise, et remontait. Malin, il marivaudait avec les limites, sans jamais les pousser dans leurs retranchements. Il avait toujours, en poche, un énième argument pour convaincre ou persuader, une autre idée pour charmer. Il avait souvent raison ; soit parce qu'il disait la vérité, soit parce qu'il s'arrangeait pour que son mensonge parût l'être. Aussi, il se délectait avec complaisance des mots de Teresa, qui lui rappelaient que, même déchu, il demeurait un ange de la stratégie et de la finesse d'esprit.
Fier, il attrapa son verre et but. Néanmoins, lorsqu'elle reprit, mutine, les commissures de ses lèvres s'affaissèrent et ses sourcils se froncèrent. Il reposa sa chope dans un claquement, qu'il aurait voulu plus maîtrisé. Tant pis. Elle savait qu'elle jouait avec ses nerfs. Il savait qu'elle le faisait à dessein. Étrangement, ce n'en était pas moins irritant. Si la meurtrière avait un don, c'était d'énerver l'Inventeur. Ils se l'étaient prouvé plusieurs fois, lors de leur séjour en prison. Il allait ouvrir la bouche pour lui renvoyer ses piques humoristiques, lorsque la dernière acheva tout à fait de le priver de répondant. Tu n'es pas aussi intelligent qu'on le prétend. Après tout, il faut être un peu idiot pour s'être fait berner par l'amour d'une femme. Il haussa les sourcils en se reculant dans son siège, puis cligna des yeux, avant de les plisser. Elle s'aventurait sur un chemin qu'ils n'avaient jamais parcouru.

Aiden, sans aucun doute, avait l'esprit d'aventure. Cependant, lorsqu'il s'agissait de parler de ses véritables sentiments, et de tout ce qui y était lié, de tout ce qui les suscitait, son ardeur s'effondrait. Parler de Juliet, il ne le faisait jamais. Il ne le faisait plus. Dans les premiers temps, il avait pu s'épancher, parce que le sentiment nouveau qui gonflait son cœur lui donnait des sensations de toute puissance, et parce que diable ! il l'aimait, il l'aimait si fort, que ne pas le dire eût été insupportable. Il avait besoin que les autres sussent et reconnussent qu'un feu brûlait en lui, et qu'ils vissent qu'elle l'aimait également, qu'elle l'aimait si fort que rien ne pourrait les séparer. C'était un premier amour d'adolescent, que la politique et le temps avaient flétri. Leurs cœurs avaient été écartelés au nom d'idéaux qu'il n'avait jamais totalement approuvés... auxquels il s'était simplement résigné. Il s'était résigné à aimer Juliet en silence, à ne plus lui dire, à se laisser détruire et à l'entraîner dans sa déchéance.
Teresa avait raison. Aimer était folie. Trop jeune et trop confiant — en lui, en l'avenir surtout —, il n'avait pas ressenti le besoin d'être méfiant, et il était tombé dans les filets de la diablesse. Il lui appartenait ; il lui avait appartenu à un point où il s'était totalement oublié pour la sauver. Puis, à nouveau, il s'était résigné. Il n'avait pas le pouvoir de sauver son amour ; il était impuissant. Il n'y a plus rien à sauver, à Vivendale, plus rien. Les Trois avaient tout massacré, y compris la fille dont il était tombé amoureux. L'amertume pourrissait encore sa bouche — il leur en voudrait pour l'éternité. Il toisa la sicaire, poussa un soupir, puis lâcha, sur un air qu'il voulait las, et qui sonna peut-être un peu trop authentique : « Je vois que je n'ai aucun secret pour toi, Teresa... Mais que veux-tu, tout homme a ses faiblesses. » Il haussa nonchalamment les épaules, comme s'il venait d'admettre une banalité. Tout était dans l'apparence, mais au son du prénom de l'espionne, il sentait ses multiples masques se fendiller.

Sûrement était-ce pour cette raison qu'il avait si mal réagi au procès. Il lui en voulait encore, mais il n'avait pu s'empêcher, au cours d'une réflexion tortueuse, de procéder à sa propre introspection. Son hypothèse, c'était qu'il avait eu peur que Juliet fît tout imploser — parce que c'était ce qu'elle faisait toujours, inévitablement, avec sa tête et son cœur. Aussi, il eut une moue désappointée à la remarque de l'assassine, et croisa les bras sur son torse. « Je ne te pensais pas si encline aux bassesses. » Il détourna le regard, le porta une nouvelle fois sur l'extérieur, la nuit, les étoiles qui étincelaient. Puis, un sourire espiègle couvrit ses lèvres, et il pivota vers elle, en posant ses deux mains sur la table et en s'avançant dans sa direction, une lueur de défi fixée au regard. « Mais j'imagine que venant d'une fille née des bas-fonds de la société, j'aurais dû m'y attendre. Difficile de s'élever quand on part de si bas. » Il arqua un sourcil, puis repartit vers l'arrière pour mieux se reposer contre son siège. Teresa était dangereuse, il en avait conscience ; mais danser avec le danger, tel était son mode de vie. L'adrénaline qui en découlait lui faisait presque oublier que le voyage et le reste du monde lui manquaient. « Et quoi ? Tu vas me faire croire que tu n'as jamais aimé personne ? Ça, c'est pourtant un grand pari pour les gens comme nous. Tu n'aimes pas les paris, Teresa ? » Il passait son temps à faire des paris. Il supposait, il calculait, puis il misait.
Le temps venu, Aiden parierait contre Katharina. Il parierait sa mort, et certainement, dans la foulée, la fin de Vivendale. S'il revenait... Il n'était encore sûr de rien. Réussirait-il à partir ? Il y était déterminé. Finirait-il par revenir ? Enchaîné à la ville... avait-il d'autres choix ? Il luttait contre cet état de fait, mais peut-être que lutter n'était plus suffisant. Peut-être que tout, en réalité, se trouvait déjà déterminé. Le jeune homme chassa cette pensée, et se concentra sur les paroles de Teresa, feignant délibérément de faire comme s'il n'allait jamais quitter la cité du Nord, et qu'il se préparerait à ses côtés, pour la guerre à venir. « Ah oui, bientôt ? Aurais-tu déjà des plans ? » Un sourire bestial s'accrocha à sa bouche. « Ça, j'y compte bien. » Ils se mordraient les doigts, tous, d'avoir cru qu'ils pouvaient le tenir en cage. Avant qu'elle n'eût le temps de répondre à sa question, il s'inclina vers la tueuse, et demanda, plus bas : « Tu ne préférerais pas qu'on sorte ? Il commence à faire chaud, ici. » Il sentait se poser sur eux les regards brûlants de quelques intéressés. Défier, oui ; finir empaler avant d'avoir pu ne serait-ce qu'entamer leurs représailles, jamais.
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Alessandra de Marbrand
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Sam 20 Jan - 19:22



TERESA LABONAIRE
— we'll rise —

Délicieux nectar, elle en savoura chaque gorgée, déstabiliser Aiden était meilleur qu'un bon vin. Cela laissait un arrière goût de victoire qui s'éternisait délicieusement en bouche. Son sourire qui s'effaçait, ses sourcils froncés, le claquement de la chope, elle savourait avec satisfaction chacune de ses saveurs, les saveurs de la surprise d'autrui. Surprise, déstabilisation, hésitation, gêne, le tout formait un cru exquis. Et elle ne se contentait pas d'y goûter, elle y étanchait avidement sa soif, buvant d'un trait dans le calice du malice. Elle passa sa langue sur ses dents alors qu'un sourire non contenu se dessina sur ses lèvres moqueuses. Elle attendait sa réaction, qu'allait-il faire. Combattre - l'attaquer, se défendre - ou bien fuir - faire l'une de ses petites pirouettes verbales et éviter le sujet - elle attendait de voir. « Je vois que je n'ai aucun secret pour toi, Teresa... Mais que veux-tu, tout homme a ses faiblesses. » lâcha-t-il dans un soupire, l'air las.  Elle fronça les sourcils, aussi surprise qu'insatisfaite par sa réponse. Elle fronça le nez, déçue, elle s'était attendue à qu'il réplique, bataille, pas ça... L'abandon avait un goût âcre en bouche, détestable aussi bien pour celui qui abandonne que celui contre qui il jette l'éponge. «Je ne te pensais pas si encline aux bassesses» Ah ! Il pivota vers elle, l'air déterminé, un sourire espiègle collé sur les lèvres. Elle haussa négligemment les épaules en esquissant le même sourire que lui, ils étaient le reflet l'un de l'autre, pareil, chacun d'un côté du miroir, piégés dans deux mondes différents. « Mais j'imagine que venant d'une fille née des bas-fonds de la société, j'aurais dû m'y attendre. Difficile de s'élever quand on part de si bas. » Elle haussa les sourcils, amusée par sa pique. Et encore je ne pas partie du bas du bas pensa-t-elle. Par rapport à d'autres, elle avait été chanceuse, née d'une famille du village, les bas-fonds de Vivendale, mais d'une des plus hautes familles de ce gouffre de pauvres. Les riches des pauvres. Elle se demanda comment cela se passerait à présent, maintenant qu'il n'y avait plus de nobles et plus de villageois, comment se dessinerait la nouvelle élite, le nouveau petit peuple ? Qui s’élèverait, et qui tomberait ?

Elle, elle s'élèverait, elle le faisait toujours, et Aiden aussi. Ils ne se contenteraient jamais d'être en bas, ils avaient ce besoin, cette urgence de monter les échelles, de devenir le meilleur. Aiden était maître dans son art, Teresa l'était dans le sien. Peu importe ce qu'il se passe autour d'eux, ils ne sont jamais, jamais tout en bas. « Et quoi ? Tu vas me faire croire que tu n'as jamais aimé personne ? Ça, c'est pourtant un grand pari pour les gens comme nous. Tu n'aimes pas les paris, Teresa ? » Elle manqua de s'étrangler avec sa gorgée et toussa tandis qu'elle reposait sa chope. Bientôt sa toux se transformant en un rire muet, enfermé entre ses lèvres closes. Elle ne s'était pas attendu à ça. « Pas vraiment » Elle haussa lentement les épaules. « Enfin... » Elle baissa son regard sur la choppe, son index suivait doucement le cercle de son ouverture. « Il y-aurait bien cet homme. » Les commissures de ses lèvres remontèrent doucement. « Très élégant, intelligent, très intelligent, stratège même, manipulateur, vicieux. Dangereux. » Elle marqua une pause, un sourire sombre collé aux lèvres. « Plus que du charisme il a quelque chose...quelque chose de magnétique tu vois. » Son doigt s'arrêta de tourner sur le bord de la choppe et elle leva son regard vers Aiden. « Mais tu sais, il a déjà quelqu'un, cette Juliet et... » Elle se mordit la lèvre inférieure, réprimant un rire tandis qu'elle tentait de finir sa phrase, en vain. Elle pouffa, arrêtant son numéro en cours, avant la fin initiale. « Très bien, j'avoue, c'était bas ça aussi. » La jeune femme attrapa sa chope et but quelques gorgées. Elle jouait, parfois de façon enfantine, avec les gens, des gens plutôt, taquiner, se moquer, déstabiliser, faire tomber les barrières. Rien n'était plus savoureux pour elle, pas même donner la mort, elle qui aimait tant ça.

La mort l'entourait de ses bras, l'étreignait avec douceur tandis qu'elle étranglait d'autres. Elle était sa fille et sa servante, gonflant ses rangs dans le monde d'en bas, ou d'en haut, cela importait peu pour elle, où ils allaient, ils partaient c'était tout. Bientôt, ce serait la reine qui partirait, une goutte de poison dans son vin, une flèche en plein cœur, un poignard dans l'estomac, peu importait la manière, elle partirait. Et Teresa, Teresa savourerait la mort à nouveau, avec la même avidité que lorsqu'elle se jouait des gens. Car elle aurait alors gagné son jeu contre Katharina, la reine qui l'aurait préféré morte, c'est Margaery qui l'avait épargné, pas la reine. Et en vivant, tandis que la gosse serait morte, elle aurait gagné la plus exquise des victoires. L'inventeur lui demanda si elle avait des plans, si elle comptait se joindre aux rebelles sûrement. La jeune femme haussa les épaules. « J'irais où le vent m'emportera, et ma bourse. » Epée-louée, mercenaire, elle vendait ses services au plus offrant, un peu comme l'avait fait Aiden avec les Trois. Ce dernier, d'ailleurs, semblait désireux de quitter le bar et les regards accusateurs des gens autour d'eux, prétextant qu'il faisait trop chaud ici pour pouvoir s'envelopper de la réconfortante obscurité des rues de nuit. Elle haussa les épaules et se leva sans un mot, suivant le pas d'Aiden jusqu'à l'extérieur. La nuit était froide, mais ils avaient connu pire, le cœur de l'hiver s'en était allé depuis longtemps, prêt à refrapper plus fort la prochaine fois. « Et toi ? Quels sont tes plans ? Retourner te terrer parmi les grands, ou bien te laisseras-tu tenter par la facilité du bas-monde ? » Elle regarda autour d'elle, personne ne les écoutait, personne ne les suivait. Ils n'étaient personne ici dehors, autour d'eux, la vie continuait, deux hommes se battaient devant l'entrée du bar, entourés par un petit groupe de spectateurs qui criaient comme des forcenés. Ils les dépassèrent pour s'engager dans la rue, rien ne servait à s'arrêter pour ce maigre spectacle, banal quotidien. Pourtant, pour avoir un peu fréquenté l'Enclave, elle savait comment les quelques rixes et chanteurs de rue qui étaient habituels ici, étaient exotiques là bas. « Tu vois, tout est plus... intense ici, vivant. » Les gens n'aimaient pas le village, c'était sale, bruyant, mal-peuplé, et dangereux, mais elle, elle l'adorait pour toutes ces raisons. « Parfois faut pas aller très loin Aiden, pour voyager. » Ici, c'était la vie brute, sans artifice, les gens parlaient forts, juraient, chantaient mal et buvaient trop, ils vivaient, ils étaient eux même.

Finalement, elle n'avait pas d'autres endroits où elle pouvait plus se sentir chez elle qu'ici, dehors, dans les rues du bas monde de la cité déchue. « N'en as-tu pas marre de là-bas ? » demanda-t-elle avec une sincérité surprenante. « Tout est si... ennuyant, prévisible, chiant » Elle poussa un soupire, l'air las. « Ils se croivent supérieurs à nous, mais ils ne valent pas mieux. Ils valent moins en fait, si vulnérables, faibles. » Elle tourna la tête vers l'inventeur, tentant de déchiffrer une quelconque émotion derrière le masque de la nuit qui s'était jeté sur eux. « Regarde toi et la fille Hart. » Elle regardait devant elle mais elle sentait le regard d'Aiden sur elle. Où voulait-elle en venir ? Comment savait-elle ? Intérieurement, elle riait doucement, il l'avait dit tout à l'heure, il n'avait aucun secret pour elle. « Les deux parias de la haute-société, je ne suis pas étonnée après qu'on dise que vous êtes partis ensemble dans ses appartements après l'une de ces petites soirées mondaines, que je l'ai vu se terrer dans ton atelier après ton départ. » Elle se souvint de ce jour, elle l'avait suivi, l'observait, quelle avait été sa surprise en voyant la Hart entrer dans l'atelier de l'inventeur. « Pauvre petite chose fragile, laisse moi deviner, une nuit ensemble et tu as bouleversé son monde. A croire qu'elle est éprise de toi, tout comme l'est ta Juliet. » Elle poussa un soupire. « Ils vous en faut peu vous là haut pour partir dans de grands émois. » Elle tourna la tête vers l'inventeur, décidant d'en venir au fait. « Je connais sa soeur, mais pas elle, et j'étais prête à accepter ce contrat mais depuis... » Elle haussa les épaules. « ...je me dis qu'elle est peut être plus intéressante vivante. » Elle esquissa un sourire qu'il ne verrait pas dans l'obscurité. « Je te laisse choisir ! Allez Aiden, choisis, découvre ce que c'est que d'avoir le choix, vraiment le choix, ces choix sales, qui jouent avec la mort pour de vrai, pas comme tes p'tits jouets de guerre. La vraie vie, hors de la tour, c'est ça. Alors, que choisis-tu ? L'épargner ou la tuer ? »


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Dezbaa
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Mar 23 Jan - 15:45



Aiden Ruthendell
— Muddy waters. —

Aux jeux des taquins, Aiden ne s'avouait jamais vaincu. S'il était susceptible, il le cachait bien — il ne l'était pas, c'était un jeu. Les attaques glissaient sur son orgueil comme la pluie sur le roc ; elles percutaient son esprit avec la force d'une comète, et de la collision ne ressortait qu'un sarcasme aiguisé. Toute sa vie, il avait joué au plus malin, au point qu'il parût possible qu'il en eût lui-même établi les règles. Oh, bien sûr, il était déjà tombé dans son propre piège ! Mais c'était un parcours d'apprentissage. Et ceux qui l'avaient assommé payeraient plus tard. Il avait la patience du chasseur. Un sourire carnassier déchira sa bouche lorsque Teresa manqua de s'étouffer avec sa boisson. Un rire ricocha dans la gorge de la sicaire, qui finalement répondit de la manière la plus évasive qui fût. Forcément. Néanmoins, il n'en perdit pas son sourire, qui s'accentua au son du « enfin » qui franchit ses lèvres comme sonne le glas de l'heure de la vérité. Il l'écouta attentivement. Si attentivement, sa réflexion focalisée sur un autre qu'il s'imaginait, qu'il ne se rendit pas compte qu'elle le décrivait, lui, le fourbe génie - la fourberie n'était-elle pas le propre des génies ? Il croisa son regard pour y chercher l'éclat d'un nom, d'un indice, pourtant rien ne vint ; finalement, tout retomba dans l'écho de sa surprise. Il éclata de rire et leva les yeux au ciel en s'appuyant contre le dossier de sa chaise. « Mais quel humour ! Moi qui m'attendais à une langoureuse et difficile déclaration d'amour à propos d'un quelconque inconnu... tant pis ! Non, en fait non, tant mieux, je crois qu'au fond, j'aurais été déçu. Celle qui donne la mort ne peut décemment pas prendre en plus l'amour, le fardeau serait trop lourd... » Un rictus moqueur barra son visage. « Ceci dit... » ajouta-t-il en levant le doigt. « Je retiens les compliments. »
Comme elle semblait bien décidée, il lui demanda si elle avait des plans, ce à quoi elle prétendit n'être guidée que par le tintement des pièces d'or. Accepterait-elle de travailler pour Katharina ou ses sujets, malgré la répulsion qu'ils, et surtout l'enfant reine, lui inspiraient ? La question lui chatouillait la langue, cependant les regards ardents qui griffaient leurs dos le dissuadèrent de l'interroger ici-même. Puisque Teresa signifiait son accord par un haussement d'épaules, il se leva, claqua quelques pièces sur la table, puis sortit du bar.

La fraîcheur de la nuit d'avril, dans sa course sur sa peau, rebroussa ses poils. Le printemps demeurait timide, comme s'il se trouvait encore sous le joug de l'hiver. Il pivota la tête, attiré par des cris ; à leur droite, devant la taverne, des hommes, visiblement, se disputaient, sous les branches d'un arbre qui ployaient sous les fleurs à peine écloses. L'herbe grasse ondulait le long du chemin. Il se détourna et continua à marcher, la brune à ses côtés. Un petit silence parut suspendre le temps, avant qu'elle ne cherchât à se renseigner sur ses propres plans. Des plans... pour une fois depuis longtemps, il n'en avait pas, pas vraiment, pas comme d'habitude. Il n'y avait pas songé. Il s'attacha encore un peu à ce mutisme de la réflexion, puis l'acheva : « Ce sont les grands qui se sont terrés. Du moins, ceux auprès desquels j'aurais pu choisir de garder ma place. Si je n'apprécie guère Katharina, je crois qu'on peut en dire de même pour elle vis-à-vis de moi. » Oh, il pourrait probablement lui être utile. Il pourrait sûrement « s'épanouir » sous ses ordres. Pourtant, par simple esprit de contradiction, par mauvaise foi, par orgueil égratigné, il refusait cette possibilité. Au-delà de cela, il n'était pas certain de vouloir se placer une nouvelle fois sous l'autorité de qui que ce fût. Peu à peu, il lui semblait qu'il renouait avec sa liberté chérie : pourquoi, encore, la sacrifier, se sacrifier ? « Quant au bas, je le connais déjà. » ajouta-t-il succinctement. Ses voyages ne s'étaient pas limités à une traversée des mers ; ils avaient aussi été l'occasion de se mêler à toutes sortes de couches sociales. Les marchands qu'étaient ses parents possédaient cette capacité d'adaptation, qu'à l'époque il trouvait très ludique. De surcroît, après son arrivée à Vivendale, il avait séjourné un certain temps au Village.
Derrière eux, le volume des braillements s'intensifia. Il jeta un coup d'œil par-dessus son épaule. Les deux hommes roulaient désormais dans la boue, sous les acclamations d'un petit comité réjoui. « Intense, je ne sais pas. Les rivalités qui existent au sein de la Tour sont simplement plus... insidieuses, fourbes. Elles ne se dévoilent au grand jour qu'au dernier moment. Et le doute, l'incertitude, je trouve ça plutôt intense. » De toute évidence, il n'était pas un homme de corps à corps. Il préférait les combats d'esprit à esprit, et l'Enclave se prêtait plus aisément à ces jeux-ci. Il hasarda : « Je crois que ce qu'il me manque, c'est surtout de la nouveauté. » Elle eut une drôle de réponse, qui résonna en lui d'une puissance étrange et étonnante. Parfois faut pas aller très loin Aiden, pour voyager. Il arqua un sourcil et la dévisagea. « Tu n'as jamais vraiment voyagé, si ? Ou tu n'as pas le goût du voyage comme moi je l'ai. » Ce goût s'ancrait en lui, un peu plus chaque jour, plus profondément, plus assurément. « Ce n'est pas tant la destination qui m'intéresse que le trajet. Les longues heures sur la route, au creux des vagues, sur les chemins sinueux des montagnes, au cœur des plaines... et tous les imprévus que ça engendre ; les tempêtes, les avalanches, les rencontres, les détours.  » L'adrénaline, le risque, le soulagement, les légendes, les feux de camp, la respiration des chevaux, les craquements de la coque, le chant de la mer, le ronronnement des montagnes, le soupir des arbres. « Je me suis forcé à la sédentarité, mais il est évident que ce n'est pas pour moi. » Dans ses gênes, dans son caractère, dans son âme, peu importait. C'était ainsi : il était un enfant du voyage, un gamin de l'inconstance, un fils de l'océan. Il rêvait d'une grandeur infinie.

Il avait cru effleurer un pan de cette immensité en demeurant ici, dans la prestigieuse capitale du Nord. Cependant, dans sa déchéance, Vivendale l'avait écrasé, aplati : elle avait placé sous ses yeux l'ampleur de son impuissance, de leur impuissance, à tous, à tous ceux qui luttent et s'empêchent. En avait-il déjà été lassé, de ce là-bas paré d'or et de rubis pour masquer les tromperies et l'ennui ? En était-il lassé ? Bien sûr. Il était prêt à lui répondre, mais elle poursuivit, et le « croivent » qu'elle laissa échapper lui vrilla les tympans. Il grimaça, et reprit aussitôt, sans pouvoir se contenir, sans même essayer de le faire : « Croient, ils se croient. » La correction, quoi qu'elle n'apportât rien au fond de la discussion, le soulagea d'une tension. « Et si, j'en ai déjà eu assez, mais pas pour les raiso... » La suite du discours de Teresa l'interrompit net. Il posa sur elle des iris verts aussi intrigués que suspicieux. Comment pouvait-elle savoir ? Cette histoire d'un soir avait-elle fait le tour de Vivendale, ou bien la meurtrière se doublait-elle d'une espionne ? Pourquoi s'être attardée sur ce détail ? Je ne suis pas étonnée après qu'on dise... Qu'on dise... Il fronça les sourcils ; finalement, décida de s'en moquer. L'espace d'un instant, il avait eu le sentiment que cela constituait une atteinte à sa vie privée — et c'en était une —, néanmoins, ensuite, il s'était rappelé que dans l'Enclave, et a fortiori dans la Haute-Tour, l'intimité brûlait dans le feu des rumeurs. Quelques semaines de voyage lui auraient presque fait oublier cela ; pourtant, c'était pour cette raison, qu'avec Juliet, ils disposaient autrefois de nombreuses cachettes. En réalité, il s'arrêta à peine une fraction de seconde sur cette portion de la phrase, car la suite se révélait encore plus intéressante, et autrement perturbante. Aiden manqua de se figer, et eut la sensation de fournir un effort énorme pour continuer à marcher normalement. « Dans mon atelier ? » articula-t-il, comme s'il désirait qu'elle répétât parce qu'il aurait mal compris. Qu'avait fait Isabelle Hart dans son atelier ? Qu'avait-elle cru y trouver ? A chaque départ, même de quelques heures, il tâchait de n'y laisser aucun document de valeur — à tout le moins, aucun ne demeurait bien en vue sur son bureau. C'était une précaution qu'il avait prise en constatant que les Trois ne se gênaient pas pour y pénétrer, et que l'invasion témérienne avait renforcé. Finalement, la Hart n'était-elle pas comme son beau-père, à pourfendre les sanctuaires, sans vergogne, sans considération pour les secrets de l'esprit et de l'âme ? Son atelier était son antre, son refuge, son temple. Sa dernière once d'intimité, celle à ne pas bafouer. Celle que les Témériens avaient renversée, mise sens dessus-dessous, ravagée. La colère ressentie à cet instant lui éraflait encore les sentiments.
Néanmoins, l'assassine n'insista pas sur ce qui pouvait paraître un détail ; elle continua sa réflexion, son analyse, son interprétation, et émit sa proposition. Alors, le génie éclata de rire face à ce qui lui semblait être d'une absurdité sans commune mesure. « L'épargner ou la tuer... Alors comme ça, quelqu'un a mis à prix la tête de l'aînée Hart ? De mieux en mieux, cette histoire. » Une pensée voila son regard, avant qu'il ne le plantât à nouveau sur la mercenaire. « Qu'essaies-tu de faire, au juste ? Parce que j'ai couché avec cette femme, je dois m'en soucier ? » Il haussa les épaules. Isabelle Hart le préoccupait déjà auparavant, pour d'autres raisons, des raisons toujours légitimes. « J'espère au moins que tu as profité du spectacle, car sache que c'était probablement la première et la dernière fois. » Aucun secret. Pour personne, sauf pour lui-même. La pensée était dérangeante, pourtant, il souriait encore. « Et, quoi ? Tu vas me dire que tu l'as vue se traîner sur le sol de mon atelier et glisser dans ses larmes ? Magnifique image, je présume... » Le sarcasme modulait l'intensité de sa voix. Il secoua la tête, des boucles blondes frémissant, puis posa un œil malicieux sur la jeune femme. « Non, non, Teresa, ce ne sont pas de grands émois. Isabelle Hart ne m'aime pas. » Son rire s'était évanoui, mais un sourire flottait toujours sur ses lèvres. « Elle exècre les Trois et particulièrement son beau-père. Moi, je suis comme leur produit. C'est insensé. » Il ne croyait pas à l'hypothèse de Teresa, en raison de visions et déductions très personnelles, et ne voulait, de toute évidence, y croire en aucun cas. Il ne bouleversait pas le monde des gens ; il ne voulait pas le bouleverser. On ne pouvait pas l'aimer ; il n'y avait que Juliet qui savait comment le faire, ou qui s'était laissée piéger. Il ne voulait pas être le pantin des Trois, mais il ne voulait pas non plus qu'on vît en lui un martyr ; il ne voulait pas qu'Isabelle, ou quiconque, pensât qu'il était un rebelle. Il était un rebelle mort-né : dans tous ses combats, il échouait. Seule son utilité lui valait la vie sauve. « Isabelle n'est qu'une connaissance. » Peut-être un peu plus ; il repensa à leur première discussion, tandis qu'il l'empêchait d'empoisonner Jason. Cette nuit-ci avait eu des allures prophétiques. Le lien se couvrait d'un mystère opaque : c'était sans doute plus que ce qu'ils voulaient bien croire et voir, mais seul le temps serait en mesure de leur révéler la vérité.

Pour le moment, le temps s'adonnait encore aux mensonges et aux faux-semblants. « Vivante, hum ? Et en quoi serait-elle plus intéressante ainsi ? » Il arqua un sourcil. « Vis-à-vis de moi ? Qu'espères-tu ? » Un sourire narquois courba sa bouche. « Une confession sentimentale ? Une petite amourette au coin du feu ? » Une idée le saisit ; il accéléra le pas pour passer devant la brune et se planter devant elle, les bras croisés, un large sourire placardé sur le visage, les cheveux ébouriffés par la brise. Il marchait en arrière. « Un peu fleur bleue, Teresa ? Un penchant pour les drames ? Pas étonnant, tu me diras... il faut aimer le sang et les larmes pour exercer ton métier. » Il ne se départissait pas de son air amusé. Dans son crâne, l'activité était intense : les hypothèses fusaient, les idées s'imbriquaient. « Les choix sales, comme tu dis, j'en ai fait plein. » rétorqua-t-il sur un ton de défi, en relevant imperceptiblement le menton. « Il est des choses pires que la mort. » Il songea brièvement à tous les abandons dont il était l'auteur, à tous les mensonges, à toutes les horreurs. « Qu'est-ce que ça pourrait bien faire, qu'elle meure ? » Soudain, il haussa les sourcils d'un air taquin. « Oh, non. Se pourrait-il que ce ne soit pas un homme, mais une femme, qui fait chavirer ton cœur ? » Il la dévisagea en papillonnant des yeux, les mains jointes sur la poitrine, puis fut secoué d'une crise de rire. Il essuya ses yeux, aux coins desquels perlaient des larmes, et reprit : « Ne me dis pas que c'est ça, ce serait vraiment trop drôle. La mort qui décline un contrat au nom de l'amour... » Il y avait quelque chose de terriblement ironique. Il haussa les épaules. « Fais comme tu veux. » Son sourire s'effaça ; il répéta plus sérieusement : « Fais comme tu veux. Moi, ça m'importe peu. J'aime bien Isabelle, sa manière de penser, mais si tu la tues, quelle importance pour moi ? Je ne compte pas rester à Vivendale. Et si tu ne le fais pas, un autre s'en chargera. Sa mort n'a pas à être sur nos consciences, mais sur celle de celui qui commandite. » Il s'arrêta, plongea son regard dans celui de la sicaire, curieux, atrocement curieux. « Qui est-ce ? Katharina, dans un moment de lucidité ? Jason, dans un éclair de jalousie prédatrice ? Un noble qui croit qu'elle pactise avec les Témériens ? Ou l'inverse ? Des Ombrageux, peut-être... Beaucoup de personnes ont de nombreuses raisons de la vouloir morte, en fait. » Il eut un rictus sarcastique. C'était le lot des parias, après tout.


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Alessandra de Marbrand
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Lun 18 Juin - 12:25



TERESA LABONAIRE
— Flipping heads or tails —

Une pièce lancée en l'air. Pile ou face. Retenant son souffle, le regard rivé sur la pièce tournoyant dans les airs, ils l'attendaient. La décision de l'hasardeux mortel qui n'était que leur fruit. Les dieux observaient cet enfant, leur enfant, échapper totalement à leur contrôle. Lui, comme les autres parias, ses enfants sortis des rangs, ses enfants libres qui faisaient la sourde oreille aux ordres dictés par leurs créateurs. Que va-t-il faire ? La sauver ? La laisser mourir ? Les dieux retenaient leur souffle, simples spectateurs de ce tirage à pile ou face. Pile, la sauver. Face, la laisser mourir. Teresa avait ouvert le jeu. Aiden avait lancé la pièce. Les exclus façonnaient leur destin entre eux, le sort d'une réprouvée entre les mains de deux parias. Loin des règles, loin des Trois, loin des Témériens, loin des dieux. La pièce tomba dans la main d'Aiden, ses doigts se refermèrent aussitôt dessus, cachant la réponse dans son poing alors qu'un éclat de rire sortait de la gorge de l'hors-caste. Il avait choisi.

Ni pile, ni face.

Lâche murmura-t-elle en son fort intérieur tandis qu'il feignait l'indifférence. Elle savait bien qu'il mentait.  Bien qu'il n'était pas forcément attaché à la condamnée, l'idée de sa mort ne lui était pas indifférent. Du moins plus qu'il ne voulait le prétendre. Elle l'avait vu, dans ses expressions, son attitude, ses haussements d'épaules. « Non, bien sûr que non » Elle éclata de rire, « Sinon je me soucierais de la moitié de la ville » Un sourire remonta les commissures de ses lèvres, il n'était plus un secret que la jeune femme profitait assidûment des plaisirs de la vie. Elle tût un « nous » sur la deuxième phrase, malgré son histoire d'un soir avec la Hart, Aiden ne semblait pas enclin à enchaîner les amours éphémères. «   Elle ne s'est pas vraiment traînée par terre mais on n'en était pas loin si tu veux mon avis » répondit-t-elle à sa discrète tentative d'obtenir des informations, feignant la moquerie plutôt que l'intérêt. Il y-avait un peu des deux, Teresa ne savait juste pas de quel côté penchait la balance. Mais elle le découvrirait bientôt.

La jeune femme s'arrêta un instant dans leur marche tandis qu'Aiden continuait de se prouver à lui comme à elle qu'Isabelle ne signifiait rien pour lui. Qu'elle ne l'aimait pas. Une simple connaissance comme il disait. Pourtant tout criait le contraire. « Oui, une connaissance » avança-t-elle à demi convaincue. « Certainement une connaissance... » ...vu tout ce que tu ignores tût-elle en son fort intérieur, laissant le jeune homme se perdre dans son jeu de l'indifférence, arrivant au moment fatidique du choix. Lâche murmura-t-elle tandis qu'il se défilait, encore. Préférant perdre la question dans un flot de pitreries, allant même jusqu'à avancer une amourette possible entre elle et Isabelle. Elle laissa échapper un rire étouffé derrière ses lèvres closes tout en levant les yeux au ciel. « Je t'ai surestimé » commença-t-elle, « Ou peut-être est-ce toi qui me sous-estimes » Elle s'arrêta, faisant face au jeune homme. « Tu n'as vraiment rien compris, ce n'est pas à propos de moi, je n'espère rien vis à vis de toi ou n'ait une quelconque affinité pour c'te Hart. » Elle planta son regard dans ses prunelles avec une étrange lueur de sérieux. « J'voulais juste t'aider » Aider, être aidé, des mots, juste des mots, jamais des actes, pour l'un comme pour l'autre. Après avoir trop attendu cette main tendue, lui coincé entre les Trois et Juliet, elle dans son enfance, ils avaient décidé de la renier une fois celle-ci arrivé. Tu es arrivé trop tard. « En plus de ça tu as tout faux » son sérieux s'envola, chassé par le retour triomphant de son sourire malicieux. « Personne ne fait chavirer mon cœur idiot, mais pour le reste je prends homme comme femme de la même manière » Elle reprit sa marche, le dépassant. « Mais ne sois pas jaloux par mon succès, je ne compte pas voler tes conquêtes » Lança-t-elle par dessus son épaule avant de se retourner pour lui faire face. « Elles sont pas vraiment mon genre, trop de drame justement, mais c'est que tu aimes non ? Plus que la manière d'penser, ce que t'aimes c'est  qu'elles sont comme toi, un produit des Trois. Juliet et Julianne, Isabelle et Jason. Ah ! Tu crois que la Hart te haïs car tu es le fruit des Trois ? C'est elle qui en est un » Elle esquissa un dernier sourire avant d'ajouter, « Littéralement. » Oh oui, elle savait tout d'eux, les enfants des Trois. Dans un futur sans Katharina, peut être auraient-ils formés la génération suivante de dirigeants, les enfants exécrant leurs parents, devenant comme eux, sauf Juliet, elle semblait apprécier son rôle, mais il était dur de se forger une opinion sur elle. « Tu dis qu'elle n'a pas d'importance mais tu te trompes, ton petit jeu prouve le contraire » Touché. « Mais il y-a bien une chose sur laquelle tu as raison, beaucoup de gens la veulent morte, mais tu as tort sur qui sont ces gens; Jason ne tuera jamais sa nièce, elle est trop précieuse. » Nièce, pas belle-fille. Savait-il ? Elle haussa les épaules, maintenant il savait, et peut-être il comprendrait plus tard ce qu'elle voulait dire. Elle abandonna alors l'identité des commanditaires pour la partie intéressante de l'histoire, les conséquences. « Tu aurais dû choisir la mort, ça l'aurait sauvé de ce qui l'attend » Il y-a des choses pires que la mort, sur ça il avait eu raison. « Tu devrais partir d'ici comme tu l'as dit, car tu vas pas aimer ce qu'il va s'y passer, une fois que les gens d'en bas auront les filles... ça va vite dégénérer, tu vas perdre la Hart et la Juliet » et pas forcément dans la mort voulut-elle ajouter mais elle se ravisa. Elle jeta un regard par dessus son épaule avant de s'enfoncer un peu plus dans ce jeu dangereux à laquelle elle jouait. « Tu veux savoir à quoi je joues ? Je te le dis, j'essaye de t'aider » Elle s'approcha, permettant de baisser la voix pour ce qui allait suivre. « Les Trois sont quatre » murmura-t-elle, « Et vous, vous êtes quatre, mais la prophétie ne parle que deux enfants. » Elle le prit dans ses bras, approchant ses lèvres de son oreille elle murmura sa dernière trahison. « Maintenant que tu sais, tu peux vraiment choisir, tu peux déjà te sauver toi, et peut être une des autres si c'est ce que tu veux, mais ne restes pas ici, Thom te tuera. » Elle se détacha et fit un pas en arrière. « Tu fais comme tu veux »

Elle lui avait livré sa mort sur un plateau, quiconque savait se trouvait condamné, ou peut être lui avait-elle fait un dernier cadeau avant que leurs chemins se séparent, le choix. Ni pile ni face, pas de possibilités énoncées à l'avance ou d'ultimatum, il ferait ce qu'il voudrait. Finalement, elle lui avait donné ce dont il avait besoin, le savoir nécessaire pour choisir, vraiment choisir. Ou peut être était-ce à elle qu'elle avait fait un cadeau, imitant le génie elle avait décidé, ni pile ni face, ce genre de choix était réservé aux enfants de dieux, coincé dans le suivi d'une ligne conductrice jusqu'à la mort, mais pas elle, pas lui, ils étaient sortis des rangs, ils avaient coupés les fils, ils étaient libres, libres de choisir.



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Dezbaa
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Lun 16 Juil - 11:58



Aiden Ruthendell
— What I could have been. —

L'Inventeur oublia qu'il était un paria. Il oublia Teresa. C'était un de ces éclairs, fugaces et invisibles, mais qui vous saisissent si bien que toutes les réalités s'estompent. Une plage se dessine. Le sable, dernier détenteur des rayons du soleil, réchauffe tendrement ses pieds. Le ciel est sombre. La lune jette sur les eaux noires ses éclats argentés. Un air de musique est joué, quelque part, dont on entend seulement des notes diffuses, comme quelques doux mots soufflés dans le vent. Il ferme les yeux. La brise joue dans ses cheveux. Une voix l'appelle. Il se retourne. Une femme est là. Elle porte une grande robe blanche et sa chevelure brune relevée dévoile son cou délicat. Elle ressemble à une apparition. Elle n'a rien à faire dans ce décor-ci, et pourtant, elle est ici, parce qu'elle sait qu'il s'agit de l'endroit où le trouver, lui. Elle est belle. Il sourit. Il a envie de lui faire l'amour, maintenant, tout de suite, là. Elle s'approche, passe ses bras derrière sa nuque, et vient respirer l'odeur salée de ses mèches blondes. Il la serre contre lui. Elle porte encore le parfum des fleurs qui ornaient sa tête, durant la cérémonie. Demain, ils remettront les voiles. Ils vogueront sur les mers, la cargaison chargée, et s'arrêteront de port en port, pour distribuer, partager, explorer. Tout est simple. Il est heureux, mais tout est simple. Il est heureux, parce que tout est simple.
Il aurait pu avoir cette vie-là s'il ne s'était pas empêtré dans Vivendale ; s'il n'était pas devenu un paria, et n'avait pas hérité du destin qui incombe aux gens de cette espèce. Une vie de marchand, aux côtés d'une femme adorée, avec un enfant ou deux, et des tonnes de livres. Il se demanda si elle lui aurait vraiment correspondu. On lui disait souvent, autrefois, qu'il ressemblait à son père, et son père s'était accommodé de cette vie-là - il l'avait choisie et aimée. Pourquoi pas lui ? Il conclut qu'il aurait pu en être de même. Il se serait posé des questions sur les Hommes, mais il les aurait si peu côtoyés - si fugacement à chaque fois - qu'ils n'auraient pas été une souffrance. Il aurait plané sur les voluptés d'une solitude toute acquise. Et ses rêves d'infini ? L'océan aurait pourvu à chacun d'eux, car l'océan est une finalité infinie, une réponse à chaque question, une caresse sur chacun de ses tourments. C'était Vivendale, qui l'avait déformé, qui l'avait battu, qui l'avait déchiré. Vivendale, terreau de tous les maux. Au fond, c'était tellement plus facile de rejeter toute la faute sur cette cité maudite ! Tellement plus facile que d'essayer de se regarder dans un miroir, et de toujours s'échapper... Mais il y avait sans doute une part de vérité. Il s'y accrochait. Tous les lieux qu'on côtoie nous transforment. La capitale du Nord avec plus d'acuité encore. Elle jouait le jeu des seigneurs et des serfs : ceux qui voulaient s'en sortir ou maintenir leur haute position finissaient corrompus. Toutes les valeurs qu'ils auraient pu promouvoir s'évaporaient dans une pluie de cendres ; le bûcher de leurs crimes brûlaient leur intégrité. Si un pécheur voulait la Hart morte, elle mourait sûrement. Ce n'était qu'une question de temps.

« Je t'ai surestimé. » Elle s'était arrêtée. Le regard vert du jeune homme, à nouveau plongé dans la réalité, avait retrouvé toute son intensité. Il toisa Teresa, les sourcils froncés. Où voulait-elle en venir ? Il secoua la tête quand elle affirma qu'il n'avait rien compris ; il avait bien compris qu'elle s'en moquait, et il s'était simplement amusé d'hypothèses rapidement élaborées - désormais, le ton emprunté par la sicaire lui faisait dire que les plaisanteries n'avaient plus lieu d'être. Ce qu'il ne comprenait pas, depuis le début de cette conversation, c'était le dessein qu'elle s'était donné. Qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire, que des gens mourussent ? Des gens mouraient tous les jours dans l'indifférence générale. Pour la Hart, ça bougerait peut-être un peu dans les rangs des anciens nobles, et puis tout retomberait dans la poussière des habitudes bien rodées. Et lui... lui, rien. La chair ne suscitait pas les sentiments, bien que l'assassine parût avoir des difficultés à le comprendre. Il y avait, sans doute, des affinités intellectuelles entre Isabelle et Aiden, mais tout s'arrêtait là. « M'aider ? » s'étonna-t-il, les traits du visage plissés dans une expression de franche incompréhension. Le génie s'attendait à une révélation, il en avait besoin, cependant le sérieux de Teresa s'évanouit et son éternel sourire revint taquiner ses lèvres.
Elle reprit sa marche. Il lui emboîta le pas. « Mes conquêtes ? » Il détesta immédiatement ce pluriel. Personne ne l'avait mis face à ses actes de cette façon. Juliet avait refusé de lui parler pendant des semaines, mais Juliet pouvait refuser de lui parler pour toutes les raisons du monde - et malheureusement, il s'y était si bien habitué que même si cela le mettait dans des états de rage prononcés, il n'en venait que rarement à réfléchir à son comportement. Depuis longtemps, Juliet avait perdu la légitimité de le remettre à sa place. Teresa se l'octroyait sans manière ; et c'était étrange. C'était difficile, pour celui qui se voilait la face, de se voir jeter à la figure ses actions refoulées. Cette nuit avait été un interlude, un interstice, à peine une nuit, tout juste une seconde. Puis il avait rabattu le rideau.
Ce que t'aimes, c'est qu'elles sont comme toi. Il s'était déjà demandé pourquoi il aimait Juliet. Il n'avait jamais trouvé la réponse. La meurtrière ne l'effleurait même pas. Il l'avait aimée bien avant qu'ils ne devinssent des pantins, et il l'avait aimée encore après. C'était autre chose. Il ne savait pas. C'était juste comme ça. Comme les choses simples, comme la fleur qui éclot au printemps, comme l'oiseau qui chante au petit matin, comme l'écume qui avance et se rétracte, comme les étoiles qui brillent et disparaissent. Aussi haïssable que cela pût l'être, l'amour n'avait pas de raison.

L'exclamation de Teresa le ramena à son discours. « Tu crois que la Hart te haïs car tu es le fruit des Trois ? C'est elle qui en est un. Littéralement. » Il haussa les épaules. Ils en étaient tous un ; les trois gamins de la Tour. Les trois. « Viens-en au fait. » s'impatienta-t-il, tandis que ses yeux roulaient dans ses orbites. Aiden commençait à se lasser de ce jeu, parce qu'il sentait que trop d'enjeux se cachaient derrière pour que l'on pût éternellement s'en amuser. Il voulait savoir. Je dois savoir. Il lâcha, d'une voix au travers de laquelle filtrait l'agacement - il en avait assez de tourner autour du pot : « Oui, elle est importante, parce que c'est un pion. » Que croyait-elle ? Il disposait de son propre échiquier. Il était comme tous les autres. Un criminel, un pécheur. Et il était doublé d'un paria. Posté là où on ne l'attendait pas - ou plus. « Mais sa mort ne changerait rien à ma partie. C'est un pion parmi tant d'autres. Substituable. » Ils étaient tous substituables. Ils jouaient des rôles remplaçables. Des rôles que d'autres pouvaient prendre.
Nièce ? Une lueur intriguée se cramponna à sa rétine. Ainsi, Thom et Jason seraient frères ? Isabelle devenait leur point de rencontre... Et l'obsession de celui qu'on prenait pour le beau-père pouvait alors trouver des justifications plus rationnelles - si tant est que les affaires familiales ont quelque chose de rationnel. Il aurait voulu pouvoir y réfléchir, retracer les schémas, gommer les erreurs, mais Teresa ne l'attendrait pas pour poursuivre. Elle avait réveillé son intérêt, si bien que son énervement s'était presque totalement dissipé. « Parce qu'en ne choisissant pas, j'ai choisi la vie ? » questionna-t-il, un sourire ironique accroché aux lèvres. Elle établissait là son propre choix, mais qu'elle lui jetât sur les épaules lui importait peu. La sicaire choisissait la vie parce que la mort aurait mis fin au manège dont elle se délectait. Peut-être que lui aussi pourrait en rire, s'il en perçait tous les rouages. Pourtant, elle ne semblait pas de cet avis. Toujours sur cette ligne sibylline, elle exposa les raisons du départ nécessaire du génie. « Les gens d'en bas ? » Et l'agacement revint chatouiller sa patience. Et pourquoi perdrait-il Juliet ? Ne l'as-tu pas déjà perdue ? murmurait une petite voix dans un coin de son cerveau. Qu'avait-elle à faire avec Isabelle, et avec ces gens d'en bas ? Que voulait dire Teresa ? De toute évidence, elle en savait beaucoup plus que ce qu'elle acceptait de lui dire. Cela devait sûrement faire partie de son jeu. Ou bien...

Elle s'arrêta encore, jeta un coup d'œil derrière son épaule ; il suivit son regard. Il n'y avait rien. Il n'était pas assez stupide pour ne pas comprendre. Elle lui disait des choses qu'elle aurait dû taire. Elle prétendait vouloir l'aider. Il ne voyait pas bien en quoi il avait besoin de son aide. Avec la chute des Trois, il était devenu diplomatiquement aussi insignifiant que n'importe quel autre homme - et personne ne pouvait deviner ce qui se tramait dans son esprit. Katharina savait que la révolte ne viendrait pas de lui. Mais peut-être ne parlait-elle pas de la reine témérienne ? Et plutôt de ces gens d'en bas, dont elle préférait taire l'identité ? Certainement. Il la laissa s'approcher, et inclina même la tête pour mieux entendre son chuchotement. Les Trois sont quatre. Arianna ? Il y pensa immédiatement, mais cette idée lui parût absurde. Elle était la sœur d'Isabelle, et si jamais Thom tramait quelque chose, elle y serait certainement liée, de près ou de loin, mais elle ne disposait pas de lien aussi profond avec les Trois que leurs engeances en avaient. La structure se dessinait mal. Deux enfants. Parlait-elle d'une filiation par le sang ? Dans ce cas, Arianna, pourquoi pas. Ou l'un des multiples enfants d'Alan... si tant était qu'un seul d'eux fût au courant de son ascendance. Julianne n'avait personne, sinon Juliet. Ce n'était pas une fille de sang. Son cœur battait fort. Il sentait le carmin pulser dans son cou. Son esprit se tortillait pour tenter de trouver une solution. Cependant, trop de vides subsistaient. Aucun schéma ne fonctionnait.
Il sondait le regard de Teresa, à la recherche d'une bribe d'information supplémentaire, d'un indice, d'une trace. Il n'y avait rien à cerner. Il se pencha encore ; elle l'enlaça. Il fronça les sourcils, ouvrit la bouche pour protester, voulut reculer, comprit qu'elle allait parler, s'immobilisa. « Maintenant que tu sais, tu peux vraiment choisir, tu peux déjà te sauver toi, et peut être une des autres si c'est ce que tu veux, mais ne restes pas ici, Thom te tuera. » Aiden eut envie de rire. Elle le lâcha et se décala. « Tu fais comme tu veux. » Il croisa son regard et un léger rire lui échappa. Et puis les choses commencèrent à s'imbriquer. « Thom Hart ? Alors c'est lui. » fit-il, presque dans un murmure. « Il fait partie des gens d'en bas, c'est ça ? » Il ne lui manquait que le motif. « Pourquoi ? » Il fixait les iris sombres de Teresa. « Parce que deux ? Parce que je suis une menace à sa prophétie ? » Un sourire narquois étirait ses lèvres. « Tous ces illuminés me fatiguent. » Au demeurant, il n'aurait jamais pensé que le père des Hart pût être un de ces fous qui croient aux présages. Il ne connaissait pas Arianna, mais Isabelle, elle lui avait semblé si terre à terre ! « Et si je reste, quoi ? Il viendra me tuer dans mon sommeil ? » Un air de défi imprégnait ses traits. C'était son problème : de vouloir défier. Cette fille ne t'appartiendra jamais. Il s'était obstiné. Elle ne lui avait jamais appartenu toute entière, il n'avait pu qu'effleurer et chérir quelques fragments de son âme, mais il s'était obstiné. Juste pour leur prouver qu'ils avaient tort. Et tant pis pour tout ce qu'il y perdrait, s'était-il dit - aujourd'hui, il avait des remords, mais pas de regrets, et il lui avait toujours semblé que les premiers valaient mieux que les seconds. C'était aussi probablement mieux de mourir ainsi. « Je n'ai pas peur de ceux qui croient aux Dieux et aux prophéties. Ça impliquerait d'avoir peur de beaucoup trop de monde. » Puis, il revint à ce qui l'intéressait le plus. « J'imagine que Thom Hart ne refonde pas une Guilde. Ils sont peut-être un peu fous, ces gens-là, mais certainement pas au point de laisser leurs actions n'être guidées que par une prophétie. » Il appuyait sur le mot, moqueur. Un peu comme s'il ne saisissait pas le danger qui rôdait. S'en moquait-il aussi ? « Alors qu'est-ce que c'est ? Une nouvelle pièce sur l'échiquier ? Ça tombe bien, on commençait à s'ennuyer... » ironisa-t-il.

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Alessandra de Marbrand
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Ven 19 Juil - 23:46



teresa labonaire

― Time has come to make things right ―




No one's going to take me alive
Time has come to make things right
You and I must fight for our rights
You and I must fight to survive

Le Nord mène la voie, les mots d'une histoire pour se rappeler, les mots d'une région pour s'identifier, les mots de maîtres pour mettre en garde. Elle leva la tête vers le ciel. Là-haut, parmi les astres, se cachait une mise en garde que peu pouvaient comprendre. Elle-même avait vécu dans l'ignorance jusqu'à récemment. Avant ça, lorsqu'elle levait le nez vers les étoiles, elle n'y voyait rien d'autres que ça, des étoiles. Ah que c'était le bon temps celui de l'ignorance ! Elle aurait voulu revenir aux temps d'avant, pas ceux de l'enfance qui lui arrachaient des sentiments contradictoires mais ceux d'un passé proche. Elle ressassa les événements des dernières semaines avec un goût amer en bouche. Ça avait commencé avec James, c'maudit James et ses plans foireux. Elle avait senti qu'il tramait quelque chose et elle avait eu raison. Elle poussa un soupire. Qu'elle avait été conne, elle aurait dû jouer les ignorantes. On leur fait rien aux ignorants, on les laisse patauger loin de la vérité, loin de ses conséquences. « Tu vois l'étoile là-haut Aiden, celle qui pointe toujours vers le nord ? C'est l'étoile de Retpa. C'tait une déesse, avec Nerla, tu le savais ? » Elle tourna la tête vers son interlocuteur. « Et tu sais comment on les appelle en bas ? Les alliées du Dieu Noir. » Elle ne répondait pas à ces questions, les gens d'en bas, Thom Hart, s'il était une menace à la prophétie, ce qu'on lui ferait s'il restait. Elle ne pouvait pas vraiment lui répondre. Savoir était dangereux. Ignorer presque tout autant.

Elle tourna lentement sur elle-même, ils semblaient être seuls, pourtant elle avait l'impression qu'ils étaient épiés. Par qui ? Les Elyens, les gens d'en bas, les nordiens, tous ? Elle fixait les iris d'Aiden, le bougre ne s'en tiendrait pas à des demi-révélations, il voulait plus. Ça se voyait dans son regard. « Tu veux vraiment tout savoir toi hein. » fit-elle en lâchant un soupire. « Tu sais que ça t'tueras un jour ? » Avant même qu'il ne puisse répondre - elle savait déjà la réponse - elle enchaîna d'une voix presque éteinte « Oui. » Déjà, son regard venait se perdre à nouveau dans le ciel constellé, pourtant elle pouvait deviner le sourire qui se dessinait sur ses lèvres. « Il fait partie des gens d'en bas » Elle croisa les bras sur sa poitrine, la nuit lui semblant soudain plus fraîche alors qu'elle se laissait aller à un jeu des plus dangereux. Les yeux toujours rivés vers les étoiles elle commençait à se demander si ce ne serait pas la dernière fois qu'elle les verrait, ces foutus points lumineux censés êtres des déesses. « Après j'peux pas te dire grand chose sur leur prophétie. » dit-elle en haussant les épaules, les bras encore collés contre elle tandis que son regard descendait sur ses pieds. « Ça parle de deux opposés, de cieux et d'ombre, de sang qui s'affronte, que de la chair de la chair naîtra la mort, celle de Vivendale et celle de ses hommes » Ces derniers mots elle ne pouvait pas les oublier. Ils l'avaient marqué. Ça parle d'la mort comme une bonne chose, avait-elle pensé en l'entendant la première fois. Les hommes de Vivendale, lui avait-on alors dit, c'étaient ceux qui étaient ignorants, c'étaient ses frères, c'étaient Jared, c'étaient Arri, c'étaient Lorna, c'étaient le Cercle, c'étaient Aiden, c'étaient Margaery, c'étaient Thomas, c'étaient tous les autres. L'éventualité seule de la chose lui glaça le sang. Elle frissonna et ses doigts vinrent se serrer autour de ses bras. « Je sais pas trop c'que tu viens faire là dedans mais ils ont dit ton nom l'autre fois. » commença-t-elle. « T'étais plus là donc j'me suis dis que c'était bon, puis t'es revenu dans ce trou. » Vivendale, l'antique cité, la glorieuse capitale, ce trou à rats. « Fais pas l'con Aiden, ces gens là... c'pas juste une histoire de dieux, ils se croient supérieurs, ils se pensent d'une autre race et ils veulent vous éradiquer comme si vous étiez des nuisibles. » Elle poussa un énième soupire. « Et pour l'instant j'suis obligée de les suivre dans leurs conneries, j'devrais pas être là, j'devrai pas te parler mais... » Elle grimaça. « Ça me foutrait mal que tu crèves maintenant. »

Elle ne put s'empêcher de réprimer un rire devant la situation. « Qui l'aurait cru hein ? Mais bon, j'ten dois une non ? Disons que c'est en souvenir de notre temps dans l'trou du donjon » Et ce temps elle se le rappelait maintenant presque nostalgique, ce temps où Aiden avait été son voisin de cellule, avec qui elle s'était engueulé, avec qui elle avait ri, avec qui elle avait compté les jours vers cette mort qui n'en avait pas été une. Peut être aurait-ce était mieux, la mort. Ils auraient été morts ignorants que la vraie guerre ne faisait que commencer. « Prends soin d'toi camarade » Et sur ces mots elle tourna le dos et s'éloigna d'un pas pressé.


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Dezbaa
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Ven 16 Aoû - 18:32



aiden ruthendell

― let's play with fire ―



Tu vois l'étoile, là-haut ? Les mots trouvèrent un écho dans sa mémoire. Un souvenir y était attaché, sur lequel il ne parvenait pas à mettre le doigt ; il glissait sur la pellicule des survivances de son passé. Quelque chose de flou et de confus, d'ancien et de futur, qui échappait à la temporalité ; et peut-être même à la réalité. Un fragment de rêve. Boum. Regarde ! La première étoile ! Une voix légère et douce, une aura tendre et lumineuse. Cette mélancolie, au creux des entrailles, qui n'avait pas lieu d'être. Le génie lutta pour chasser cette sensation et se concentrer sur les propos de Teresa. Repta, Nerla, Dieu Noir. Des mots vides pour un rendu sibyllin. L'intellectuel ne pouvait pas s'en contenter. L'appel de la vérité rognait sa faible patience. Dans son silence préservé, chaque fraction de son être le criait. Ses prunelles sondaient son acolyte, à la recherche d'un détail ou d'un indice révélateur. Tu sais que ça t'tuera, un jour ? Ce type de prédiction ne lui était pas étranger. Tous les curieux savent quel est leur pire défaut. Un sourire mutin étira ses lèvres tandis qu'elle poursuivait, cédant à la demande oppressante de son intérêt. L'excitation dansait comme un feu follet sur sa rétine. Thom Hart et les gens d'en-bas. Le tableau demeurait une aquarelle terne et vieillie par le temps, cependant, peu à peu, quelques contours se précisaient.

Deux opposés, cieux et ombres, sang et combat, chair et mort, Vivendale et les Hommes. Aiden fronça les sourcils. Il n'aimait pas les prophéties. L'ascendant qu'elles pouvaient exercer sur les esprits séduits par leur mysticité le révoltait. Ce n'étaient que des foutaises. Des histoires pour contenir les foules ou les galvaniser ; des manipulations pour décrocher l'étoile du pouvoir ou la faire tomber. Elles étaient des armes pour des luttes d'ego. Il n'y croyait pas, n'y avait jamais cru, n'y croirait jamais. Alors, il regardait Teresa avec une expression où tourbillonnaient la défiance et l'insolence. Néanmoins, lorsqu'elle lui apprit qu'ils avaient mentionné son nom, une touche de surprise teinta ses iris verts. Qui...? Isabelle ? « Je n'ai pas peur des illuminés, Teresa. » répéta-t-il. Il les méprisait. Son mépris avait toujours suffi à tenir les autres à distance. Et s'ils venaient... les lions savaient se défendre. Même les lions déchus ; en eux sommeillaient la puissance de leur essence. « Même si je dois admettre qu'ils ont raison sur un point : je suis un nuisible, et probablement encore plus pour eux, qui défendent la foi et les dogmes. » Hérétique. Il aurait mieux fait de ne pas l'affirmer tout haut, maintenant qu'il ne jouissait plus de la protection des Trois - malgré leur terrible emprise, ils lui avaient accordé des libertés inespérées, comme celle de l'âme. Les seules forces devant lesquelles s'inclinaient l'Inventeur étaient terriblement humaines. Et elles ne l'avaient jamais tué. « Je ne mourrai pas bientôt. » Il l'avait dit avec tant d'aplomb que n'importe qui aurait été tenté de le croire. « Je le sais, c'est tout. » Il se sentait obligé de l'ajouter, quoique cela ne légitimât en rien sa croyance. Elle ne se fondait sur aucun élément rationnel. Juste ce sentiment, dans le creux de sa poitrine. « Ne sois donc pas triste, tu auras tout le temps de constater à quel point je peux être nuisible. Notre séjour en prison n'était qu'un maigre aperçu. Une mise en bouche, dirons-nous... » Un énième sourire taquin s'invita sur ses lèvres. S'ils voulaient jouer, ils joueraient. Le génie n'aimait pas les Hommes qui ne juraient que par leur foi, mais il était incapable de refuser une partie. La possibilité que Thom Hart eût l'esprit aiguisé de sa fille aînée ajoutait à son impatience ; le jeu n'en serait que plus excitant. « Toi aussi. Je n'ai pas envie de croiser ta tombe, la prochaine fois que nous nous verrons. » Car ils se reverraient. C'était écrit, quelque part, dans une prophétie. Une lueur ironique valsa dans ses prunelles sombres, tandis qu'il regardait la sicaire s'éloigner. Elle lui avait laissé matière à réfléchir.

FIN

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